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Je me redressais alors et plongeais mon regard dans le sien, avant de le baisser sur cette bouche qui me donnait envie et que je pouvais observer. Ma main sur son torse remonta pour passer un doigt sur ses lippes et son visage en une légère et un sourire naquit sur les miennes.
-C'est à se demander pourquoi tu les caches.
Mes yeux fixaient à nouveau ses prunelles. Ma main vagabonde se posa alors sur sa taille, l'autre sur sa main à lui, et je m'approchais doucement pour un doux baiser. Les yeux fermés, je me liais à lui par nos lèvres, rapprochant nos corps l'un de l'autre. De sa taille, ma main glissa dans son dos, sur ses reins. De sage, le baiser se fit plus passionné, restant à l'écoute de cet homme qui faisait battre mon coeur. S'il était pris de la même passion, je continuais, mais si je sentais comme une résistance j'arrêtais.
Je finis par m'écarter, les joues rosies par le plaisir éprouvé par cet échange.
-Je plaisantais quand je disais que tes lèvres seraient le dessert, mais je t'avoue que... c'est un dessert qui me plait bien...
Il y a ceux qui profitent de l’instant sans se soucier de l’avenir et ceux qui n’osent jamais. Parmi tant de profils qu’il y avait d’individus, tous avaient une part de magie tant il était surprenant d’en découvrir les contours. De Reiichi, le cuisinier a retenu la douceur du miel réfléchissant la lumière que l’herboriste ne soupçonnait pas aussi chaleureuse. La caresse de ses lèvres la première fois qu’ils se sont embrassés. Puis la seconde. Le sourire enjôleur et la timidité presque maladive. Les mots qu’il ne prononce pas et ceux qu’il avoue dans un souffle. L’alcool sur sa langue et le goût de leur étreinte. Un sourire se forme dévoilant des canines plus pointues que la moyenne. « Pour que l’on ne soit pas tenté » mensonge qui endolorit les sens. On ne lui fera pas trahir ce secret dans l’immédiat et il le sait pertinemment il n’a aucune importance tant la curiosité de l’herboriste était plus fascinée par la découverte de son visage que pour la raison de son masque. Tous deux avaient à faire, envoûtés l’un par l’autre dans les vapeurs d’un alcool les rendant téméraires.
Une main se pose contre la sienne, l’autre sur sa taille trouve son chemin sans peine au creux de ses reins. Si le tissu n’entravait pas la sensation grisante du contact, l’air venait tout de même à manquer par les échanges sans cesse surenchéris des deux hommes, forcés de mettre un terme aux baisers langoureux. La séparation plus nécessaire que souhaitée contraint Akihiro a concentrer son attention sur les paroles et il se met à rire « il y a bel et bien un dessert de prévu, mais celui-ci est bien meilleur » d’une main furtive il longe sa nuque, de son pouce caressant la pomme qu’il lorgne et vers laquelle il choit, laissant derrière lui le souvenir de ce désir brûlant marqué par ses lèvres. Bientôt, il n’aura plus besoin de s’aider d’une main pour retenir son corps, tant il est plus proche de faire tomber Reiichi que l’inverse, ne se souciant guère de tout le reste. Repas bien vite oublié au profit d’un sentiment étouffé trop longtemps reprenant le dessus.
Puis ma main s'infiltra sous le vêtement. La seconde vint l'aider. Et mes doigts, sans doute un peu froids, entrèrent en contact avec la peau d'Akihiro. Chaude et douce. Douce et plaisante. Plaisante et enivrante. La tentation de le découvrir davantage était née.
Dit moi que tu voulais continuer aussi cette étreinte. Dit moi que je n'étais pas le seul à brûler intérieurement d'envie pour toi. Peut-être que demain, lorsque j'aurai les idées claires, je regretterai. Mais là, je voulais t'exprimer mon amour pour toi dans sa forme la plus charnelle.
Rien de plus qu’une rose, dont la teinte variait en fonction des saisons et les pétales se fanaient aux empreintes du froid comme de la chaleur d’un corps étranger trop gourmand dans un moment qui ne s’y prêtait pas. Là, lorsque la température était idéale et que le geste se faisait délicat, elle s’ouvrait et dévoilait toute sa fragilité aussi exquise que dangereuse si on tentait de la cueillir. Il ne fallait pas en oublier les épines. Le cœur fonctionnait de cette même façon et s’il avait la possibilité de se reconstruire contrairement à la fleur, le souvenir de ses blessures demeurait éternel. Pourtant, la douleur s’estompait, distillée par d’autres mains pour redessiner les contours de l’œuvre originale en la sublimant davantage. Il n’y avait rien de plus beau que de survivre aux intempéries d’une vie sauvage et indifférente à ses sujets. C’était une victoire étrange provoquant le doute d’avoir atteint un sommet à l’encontre de celui ou celle qui s’obstinait à mettre des obstacles.
Akihiro se sentait bien et au creux de son ventre se nouait parfois la peur que ce bonheur soit éphémère. Si longtemps réprimé qu’il en avait oublié la sensation et si son cœur s’emballe c’est à l’unisson avec celui de l’herboriste, dévasté par le feu ardant qui les consument à détruire tout sur son passage, emportant leur amitié si solide était-elle pour renaitre sous une forme encore indéfinie. Oh, le cuisinier sait bien ce dont il s’agit et il en a foncièrement peur. Malgré tout, c’est ce besoin de lui qui prend le dessus et entremêle les émotions quelques heures durant.
Lorsque les soupirs laissent place au calme et que la lumière manque, seules leurs ombres se meuvent et s’enlacent dans une douce étreinte. Le cuisinier ne rode pas dans les couloirs de l’école ce soir et il ne ressent aucunement l’envie de se dérober aux bras de Reiichi.
Ce n'est qu'à l'aube que j'ouvris les yeux. L'esprit embrumé par le sommeil, j'émergeais avec lenteur. Et presque dans mes bras, se trouvait Akihiro. Le rouge me monta aux joues, me souvenant de la nuit. Jamais je n'aurais pensé aller jusque là avec lui. J'avais déjà dérapé avec d'autres de mes amis, mais ... Akihiro ?
Je remuais et m'allongeais sur le dos. J'avais peut-être juste fait un rêve érotique... ? L'hypothèse vola en miettes. Tout avait été trop réel, depuis l'odeur de ses cheveux et de sa peau jusqu'aux sensations reçues. Je poussais un mince soupir avant de m'extirper lentement de la chaleur du lit. Je m'échappais vers la salle de bain où je pourrais remettre mes idées en ordre. Car maintenant, comment je devais réagir ? Après tout, ça avait été naturel. Il n'y avait pas de honte à avoir. Agir comme d'habitude était la clef. C'était assez facile, c'était comme avec Akira.
Ou du moins, c'était ce que je croyais.
La place près de lui devient plus légère et les froissements du tissu en plus des bruits de pas le réveillent doucement tandis qu’il réalise être dans la chambre d’un autre plutôt qu’à Mahoutokoro. Le décor n’est pas si différent, seule subsiste la chaleur de leurs corps entrelacés et le vide à ses côtés. Alors, dans le silence de la pièce il se lève et s’habille entièrement, profitant du début de cette matinée claire pour quelques courses rapides. Il sait déjà quoi prendre, se contente de payer, revenir et établir en un rien de temps un petit déjeuner qui n’a rien de magique si ce n’était son temps de préparation relativement court.
Lorsque l’eau ne se fait plus entendre, les plats sont dressés et il attend patiemment, réalisant par la même occasion que ça ne serait plus pareil. Akihiro se demandait pourquoi il avait cédé, mais connaissait déjà la réponse. Depuis si longtemps peut-être avait-il réprimé cette envie jusqu’à ce qu’elle soit trop grande pour être finalement contenue. Ça n’avait rien d’exceptionnel, ni de temporaire et il le savait, en quel cas depuis tout ce temps, les sentiments se seraient évaporés. Mais ils étaient bien là et il ne comptait pas fuir les responsabilités qu’il avait envers Reiichi, encore moins la conversation tant redoutée qui poussait justement à ces conclusions trop expéditives. « Bonjour, bien dormi ? » laissa-t-il entendre en présentant thé et mets.
-Oui, très bien et toi ?
Je haussais un sourcil en voyant le petit déjeuner préparé, me sentant gêner qu'il l'ait fait, mais aussi ravi. Je me saisis d'une tasse de thé et humai l'odeur avant de souffler doucement dessus pour ne pas me brûler lorsque je boirai.
-Tu ne vas pas avoir de problèmes pour ne pas être sur l'île ?
Finalement, agir naturellement était facile. Mes mots me venaient aisément. Seul subsistait mon sourire heureux de voir ses lèvres dénudées, rappels de notre soirée, des secrets avoués et de la nuit passée.
Le temps s’était arrêté pour le laisser profiter de la moue hésitante de son ami. Qu’étaient-ils devenus ? Amis, amants ou autre chose ? Akihiro voulait le savoir, car lui-même avait des doutes. Il n’avait pas exclu les sentiments qu’il avait pour Reiichi, mais ne les ’imposerait pas si l’ancien kitsune n’en voulait pas. Encore fallait-il le lui demander en douceur. Dans son sourire dévoilé de petites canines pointues, il attend des réponses et le thé aidait à combler les silences sans qu’ils n’en soient gênant. « Hm… non, j’ai envoyé un origami pour signaler que je serais en retard » un léger retard au vue de l’heure, il serait là en un claquement de doigts et profiterait d’une douche lorsque sa pause se présentera. Pour l’instant, ce n’était pas sa première préoccupation et une fois l’un en face de l’autre, le cuisinier déposa lentement sa tasse.
« J’ai très peu de temps, mais je ne suis pas du genre à m’éclipser sans un mot » il ne savait rien de comment était Reiichi et comment il voulait se comporter avec lui dorénavant, mais il préféra être simple dans ses choix, exprimant ses pensées aussi peu claires étaient-elles. « Je ne te cacherais pas que je t’apprécie sans doute plus que ce que je pensais depuis ces années et je ne sais pas ce que ça donnera. La seule chose dont je suis certain c’est que peu importe ce qu’il en est pour toi je respecterais tes choix et tes sentiments » pourquoi partir sur quelque chose de négatif ? Parce qu’il préférait privilégier sa relation peu importe la nature, quitte à en souffrir que de la gâcher en imposant sa peine. Le thé était sucré, doux et l’enivrait assez pour qu’il se sente à son aise et qu’un poids s’envole du creux de son estomac. Il n’y avait aucune contrariété désormais si ce n’est celle de l’attente.
Ainsi, il m'appréciait plus que ce qu'il ne pensait... Mais était-ce seulement physique ou aussi sentimentalement ? Une certaine peur s'empara de moi. Celle de perdre une amitié. Celle de ruiner une relation que j'appréciais. Puis la suite de ses mots m'apaisa.
-Tu accepterais de conserver notre amitié ?
Et juste notre amitié.
Mes yeux s'étaient posés sur la tasse de thé dont le breuvage était à la moitié. J'étais incapable de dire ce que je ressentais en cet instant précis. C'était agréable de savoir qu'il m'appréciait davantage, mais aussi angoissant. Si être proche, tactile et ambigu dans mes amitiés ne m'avaient jamais dérangé auparavant, c'était parce que je savais que c'était de l'amitié. Mais là... Il y avait comme quelque de légèrement différent. Et je ne voulais pas non plus le blesser. Je relevais les yeux vers lui.
-Elle m'est chère. C'est la seule chose dont je suis certain en cet instant. Tout le reste est assez...vague, je dois dire...
J'allais devoir remettre de l'ordre dans mes idées...
Le thé remplissait son estomac plus que le bol de riz qu’il se forçait à ingurgiter pour passer une bonne journée. Il se permit de nettoyer les bols et autres ustensiles utilisés par réflexe en attendant de savoir ce que souhaitait faire Reiichi de leur relation. De ses épaules qui s’affaissèrent au sourire qui se profilait, Akihiro compris qu’il était aussi soulagé que lui de ne pas avoir à perdre ce qu’ils avaient. Il pouvait y avoir plus entre eux, les barrières de toute façon très floues entre amour et amitié, le cuisinier ne les avait jamais vraiment vus, il savait par intuition où se placer, mais détestait les cases. Par-delà cette vision, il y avait aussi plusieurs façons d’aimer et à sa façon, il en aimait d’autres. Il en avait aimé comme Reiichi, une seule, peut-être plus, mais une seule qui ai su lui donner l’envie de fonder une famille.
Dans sa gorge, il retient la comparaison, remettant le masque, se sentant mieux derrière, souriant une dernière fois au jeune homme. « Oui c’est aussi important pour moi » et c’était aussi très particulier de réfléchir à une relation après une nuit aussi surprenante par son intensité que par le moment qui avait été opportun. Démêler leurs sentiments et les comprendre ne se ferait pas en quelques minutes. « Bien sûr, il faut y réfléchir ou au contraire laisser les choses se faire, sans pression » Akihiro n’était pas du genre à abandonner ceux qu’il aimait, même si pour cela il devait taire des sentiments qui n’étaient pas réciproques. Il savait qu’il ne faisait que très rarement les choses sur un coup de tête. « Je vais vraiment devoir y aller, déjeune bien et à très vite » ne pouvant s’en empêcher, il s’approche et dérobe un baiser au travers de son masque, toujours espiègle cela ressemblait davantage à une caresse, une plaisanterie qu’à une intention de briser ce qu’il venait de dire à l’instant. Puis, il s’éclipsa pour retrouver les cuisines de l’école où de nouveaux repas n’attendaient plus que lui pour être préparés.
Je déposais la tasse sur la table. L'heure des au revoir avait sonné, nos travails respectifs nous attendaient.
-Rentre bien.
Un sourire, à nouveau, puis la surprise à cause de ce baiser masqué. Un rire d'amusement m'échappa. Je le regardais s'en aller, apaisé à l'idée que notre nuit ensemble ne changeait rien à notre amitié actuelle.
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