équinoxe (takumi)
Shisui Awataguchi
Citation : Nulle lune, et l'obscurité s'approfondit.
Age : 100 ans. 25/03/1898.
Rang : S0.
Susanoo
Shisui Awataguchi
La silhouette de lune s’imposait sous les premières lueurs du crépusucle lorsque s’achevèrent ses longues prières adressées aux kami, privant l’horizon des teintes enflammées d’une saison dont il appréciait la venue : quelques brises algides léchèrent la surface de ses amples vêtements sans qu’il ne s’en trouve importuné, car son esprit s’attardait ailleurs. D’un naturel profondément patient, Shisui ne trouvait plus tendre confort qu’en un perpétuel écumage d’une bibliothèque sans fin, car même un siècle d’intérêt ne parvenait à couvrir mille ans de savoir : il ne comptait plus les heures allouées à cette quiétude dont seul le terme de son règne aurait su prolonger le plaisir, et le temps s’y voyait irrémédiablement dilué.
Par ailleurs, le sorcier n’éprouvait nulle lassitude dans ses lectures continuelles du Tsurezuregusa, car toute anthropologie consacrée à l’édification spirituelle de son public n’avait cesse de livrer de nouveaux secrets, surtout pour qui s’évertuait à croire en l’hétérogénéité des êtres : quiconque cherchait le savoir ne trouvait de limite à son érudition, car les germes de la sagesse germaient essentiellement de la réflexion. En cela, Shisui n’éprouvait nul scepticisme quant à la justesse de ses décisions et à la direction qu’il avait si longuement donné à son clan ; cette croisade, avait-il estimé sous la menace d’une fatigue grandissante, touchait cependant à son terme—non sans une postérité assurée.
Non loin, le cri de son familier détourna son attention du bijou littéraire qui le tenait en haleine depuis longtemps déjà, et sa main, levée dans un geste solennel, lui imposa le silence : l’heure n’était point à ses frivolités personnelles car la silhouette de son enfant se dessinait au loin. Aussi fier qu’il demeurait impassible, Takumi lui revenait, dans cette démarche dont l’élégance lui venait assurément d’éducation comme d’une hérédité exempte de moindre impureté. Le temps—au même titre que la distance—se chargeait de rarifier vos rapports, mais également de vivifier ses plus récentes certitudes : s’il existait un homme à même de répondre de ses attentes, ton jeune fils était le parfait candidat.
Takumi, je suis ravi de te voir, et la voix se laissa résonner comme une feuille emportée par les sifflements du vent, et la nature elle-même ployait devant un être si majestueux qu’il en semblait inhumain. Shisui incarnait le summum de ce que les déités se devaient d’attendre des hommes auxquels elles avaient généreusement confié leur bénédiction : pourvu de la plus profonde droiture comme d’un amour sans faille, car seule une sévère éducation s’engageait comme preuve de ses responsabilités paternelles. Takumi, à lui seul, témoignait de cette réussite. Suis-moi. Je ne vais pas te faire attendre plus longtemps.
Le climat doucereux s’imposait aux larges épaules de sa plus fière engeance, comme parfait réceptacle des principes que cent ans d’existence n’étaient parvenues à émousser. Si le besoin de quiétude remettait en cause l’intégrité qui l’avait mené jusqu’ici, sa détermination le poussait à l’écart du pouvoir, pour en assurer la grandeur, et désormais, il n'était plus tant chef qu'un père troublé d'émoi. Sa gracieuse démarche le conduit jusqu’au charmant pavillon qui sublimait ce jardin aux merveilles babyloniennes, et sans autre forme de procès, il invita son fils à s’y asseoir—car un thé tout juste achevé les y attendait déjà. Je souhaite que tu me succèdes, avoua-t-il, comme la plus tendre des confessions.
Par ailleurs, le sorcier n’éprouvait nulle lassitude dans ses lectures continuelles du Tsurezuregusa, car toute anthropologie consacrée à l’édification spirituelle de son public n’avait cesse de livrer de nouveaux secrets, surtout pour qui s’évertuait à croire en l’hétérogénéité des êtres : quiconque cherchait le savoir ne trouvait de limite à son érudition, car les germes de la sagesse germaient essentiellement de la réflexion. En cela, Shisui n’éprouvait nul scepticisme quant à la justesse de ses décisions et à la direction qu’il avait si longuement donné à son clan ; cette croisade, avait-il estimé sous la menace d’une fatigue grandissante, touchait cependant à son terme—non sans une postérité assurée.
Non loin, le cri de son familier détourna son attention du bijou littéraire qui le tenait en haleine depuis longtemps déjà, et sa main, levée dans un geste solennel, lui imposa le silence : l’heure n’était point à ses frivolités personnelles car la silhouette de son enfant se dessinait au loin. Aussi fier qu’il demeurait impassible, Takumi lui revenait, dans cette démarche dont l’élégance lui venait assurément d’éducation comme d’une hérédité exempte de moindre impureté. Le temps—au même titre que la distance—se chargeait de rarifier vos rapports, mais également de vivifier ses plus récentes certitudes : s’il existait un homme à même de répondre de ses attentes, ton jeune fils était le parfait candidat.
Takumi, je suis ravi de te voir, et la voix se laissa résonner comme une feuille emportée par les sifflements du vent, et la nature elle-même ployait devant un être si majestueux qu’il en semblait inhumain. Shisui incarnait le summum de ce que les déités se devaient d’attendre des hommes auxquels elles avaient généreusement confié leur bénédiction : pourvu de la plus profonde droiture comme d’un amour sans faille, car seule une sévère éducation s’engageait comme preuve de ses responsabilités paternelles. Takumi, à lui seul, témoignait de cette réussite. Suis-moi. Je ne vais pas te faire attendre plus longtemps.
Le climat doucereux s’imposait aux larges épaules de sa plus fière engeance, comme parfait réceptacle des principes que cent ans d’existence n’étaient parvenues à émousser. Si le besoin de quiétude remettait en cause l’intégrité qui l’avait mené jusqu’ici, sa détermination le poussait à l’écart du pouvoir, pour en assurer la grandeur, et désormais, il n'était plus tant chef qu'un père troublé d'émoi. Sa gracieuse démarche le conduit jusqu’au charmant pavillon qui sublimait ce jardin aux merveilles babyloniennes, et sans autre forme de procès, il invita son fils à s’y asseoir—car un thé tout juste achevé les y attendait déjà. Je souhaite que tu me succèdes, avoua-t-il, comme la plus tendre des confessions.
Takumi Awataguchi
Pour le bien des siens.
L’écarlate était une couleur commune, les momiji constamment éveillés, Takumi en avait toujours apprécié leur beauté. Jamais ils n’avaient été autrement, et il se demandait parfois quelle allure aurait le domaine s’ils disparaissaient un jour.
Peut-être serait-il un peu vide.
Au loin se dessinait la silhouette de son père, des traits gravés dans du jade pur, intemporel. Il l’avait toujours connu ainsi, comme s’il était en pause depuis toutes ces années. Ce qui n’était pas totalement faux, il était possible de feindre une jeunesse éternelle. Mais Takumi se demandait à quoi son père ressemblerait s’il n’utilisait pas la magie. Serait-il encore en vie ?
D’un œil amusé, attiré par son tintamarre, l’onmyoji observait l’âne de son père sans nul mot. Il le connaissait depuis des années désormais, et l’animal lui avait toujours paru inutilement bruyant, sans que jamais il ne puisse comprendre la raison qui le poussait à beugler sans arrêt. Peut-être avait-il seulement très mauvais caractère.
Ce n’était pas impossible.
Mais avant même qu’il ne puisse parler, la demande fut évoquée.
Non pas qu’elle fut particulièrement surprenante, mais il n’aurait jamais cru qu’elle viendrait aussi vite. D’un mouvement gracile, Takumi prenait en main la tasse de gyokuro pour en boire le contenu, prenant ainsi quelques longues secondes avant de répondre.
Shisui Awataguchi
Citation : Nulle lune, et l'obscurité s'approfondit.
Age : 100 ans. 25/03/1898.
Rang : S0.
Susanoo
Shisui Awataguchi
Le pavillon de mille existences
Deux nobles entités bénis
Souvenirs embellis
D'un geste sec, j'intimais à l'animal de cesser son chahut, m'accordant un silence comme indéfectible soutien envers mes réflexions poétiques, et qui m'empêchait de sombrer dans la détresse d'une inspiration nullifiée. La réponse de Takumi ne me laissait nullement indifférent, tout au contraire : il n'existait de sentiment plus inspirant que la fierté paternelle qui éveillait en moi, car je contemplais—en chaque instant de notre intimité—la dignité dont il était pourvu. En cela, mon éducation n'avait été qu'un nébuleux aiguillage quant aux vertus du clan, et il en retranscrivait l'importance par lui-même, et en une justesse redoutable.
J'estimais, depuis longtemps déjà, qu'il se comparait aux plus belles lames de notre panthéon familial : ne se dérobait à sa conception que la nécessité de l'expérience et dont ma décision, si abrupte qu'elle fut, suffirait à le forger. Ce sentiment—entre nostalgie et appréhension—m'intima les faveurs d'un nouveau haiku, mais dont je ne m'autorisais à rédiger le contenu ; ma main trouva le contact de celle de mon tendre fils pour lui témoigner de mes plus sincères émotions, car en l'instant, son bonheur m'importait plus que tout.
Le doute me gagne, me contentais-je de répondre, en compendieux aveu. Devrais-je confier mes incertitudes à qui, très bientôt, prônerait les valeurs de notre famille ? La poésie comme l'âge m'insufflait une sagesse nouvelle, et pourtant dangereuse, car s'insufflaient en moi de réflexions nouvelles, et jusque là inconsidérées : à l'aube d'un siècle de vie, mes certitudes ployaient sous un renouveau intellectuel, comme d'un besoin, je me devais de l'admettre, d'une quiétude personnelle et bien méritée.
Tu m'évoques sans nul doute les plus précieuses valeurs des Awataguchi, et il n'existe en notre modeste pays d'homme plus juste, ni d'onmyoji de plus talentueux que toi.
Si les enseignants de Mahoutokoro se considéraient comme au summum de leur discipline respective, ce n'était sans raison : d'aucuns désignaient le jeune Kurosawa comme le plus grand sorcier de notre génération, mais je ne partageais de si précipitées opinions. L'expérience et la rigueur de mon fils ne trouvait d'égal humain, car l'indiscipline d'un félon desservait son talent. Si d'aventure j'avais hérité d'un fils aussi déloyal, la honte m'aurait poussé à me châtier d'un tel déshonneur : il n'existait de plus précieuse valeur que la fidélité dont Takumi n'avait cesse de me témoigner, et dont ma destitution ne me priverait davantage.
Mon fils, c'est désormais moi, et l'entièreté de notre sang qui nous plierons à tes décisions. Je n'éprouve nulle inquiétude, mais si je devais formuler une ultime demande, sans doute te demanderai-je des festivités à la hauteur de mon siècle à venir.
Car l'âge, comprenez, ne me priverait jamais d'humour.
Deux nobles entités bénis
Souvenirs embellis
D'un geste sec, j'intimais à l'animal de cesser son chahut, m'accordant un silence comme indéfectible soutien envers mes réflexions poétiques, et qui m'empêchait de sombrer dans la détresse d'une inspiration nullifiée. La réponse de Takumi ne me laissait nullement indifférent, tout au contraire : il n'existait de sentiment plus inspirant que la fierté paternelle qui éveillait en moi, car je contemplais—en chaque instant de notre intimité—la dignité dont il était pourvu. En cela, mon éducation n'avait été qu'un nébuleux aiguillage quant aux vertus du clan, et il en retranscrivait l'importance par lui-même, et en une justesse redoutable.
J'estimais, depuis longtemps déjà, qu'il se comparait aux plus belles lames de notre panthéon familial : ne se dérobait à sa conception que la nécessité de l'expérience et dont ma décision, si abrupte qu'elle fut, suffirait à le forger. Ce sentiment—entre nostalgie et appréhension—m'intima les faveurs d'un nouveau haiku, mais dont je ne m'autorisais à rédiger le contenu ; ma main trouva le contact de celle de mon tendre fils pour lui témoigner de mes plus sincères émotions, car en l'instant, son bonheur m'importait plus que tout.
Le doute me gagne, me contentais-je de répondre, en compendieux aveu. Devrais-je confier mes incertitudes à qui, très bientôt, prônerait les valeurs de notre famille ? La poésie comme l'âge m'insufflait une sagesse nouvelle, et pourtant dangereuse, car s'insufflaient en moi de réflexions nouvelles, et jusque là inconsidérées : à l'aube d'un siècle de vie, mes certitudes ployaient sous un renouveau intellectuel, comme d'un besoin, je me devais de l'admettre, d'une quiétude personnelle et bien méritée.
Tu m'évoques sans nul doute les plus précieuses valeurs des Awataguchi, et il n'existe en notre modeste pays d'homme plus juste, ni d'onmyoji de plus talentueux que toi.
Si les enseignants de Mahoutokoro se considéraient comme au summum de leur discipline respective, ce n'était sans raison : d'aucuns désignaient le jeune Kurosawa comme le plus grand sorcier de notre génération, mais je ne partageais de si précipitées opinions. L'expérience et la rigueur de mon fils ne trouvait d'égal humain, car l'indiscipline d'un félon desservait son talent. Si d'aventure j'avais hérité d'un fils aussi déloyal, la honte m'aurait poussé à me châtier d'un tel déshonneur : il n'existait de plus précieuse valeur que la fidélité dont Takumi n'avait cesse de me témoigner, et dont ma destitution ne me priverait davantage.
Mon fils, c'est désormais moi, et l'entièreté de notre sang qui nous plierons à tes décisions. Je n'éprouve nulle inquiétude, mais si je devais formuler une ultime demande, sans doute te demanderai-je des festivités à la hauteur de mon siècle à venir.
Car l'âge, comprenez, ne me priverait jamais d'humour.
Takumi Awataguchi
Parfaitement installé face à son père, mains liées par une tendresse familiale inégale – engeance favorite sans nul doute. L’ancien onmyoji portait son unique œil sur son paternel, analysant ses moindres gestes en quête de réponses silencieuses. Il avait souhaité devenir plus fort pour être la fierté de son père, de ne pas lui offrir disgrâce ni remords. Les règles du clan gravé en son âme, impossible à retirer de sa mémoire. Heureux, bien que peu démonstratif, il s’inclinait légèrement pour remercier Shisui des éloges faites à son propos.
L’éternel automne des feuillages se mettaient à s’illuminer à mesure que le soleil quittait son trône au sommet des cieux, laissant place à la lune. Spectacle habituelle au domaine et pourtant, Takumi ne s’en lassait guère. Les longues allées décorées de lanternes rougeoyantes, les érables illuminés éclairant de leur majesté le domaine d’une chaleur apaisante.
Shisui Awataguchi
Citation : Nulle lune, et l'obscurité s'approfondit.
Age : 100 ans. 25/03/1898.
Rang : S0.
Susanoo
Shisui Awataguchi
Si nombre d'âmes se laissaient intimider par l'immense silhouette du chef que j'incarnais depuis toujours, Takumi se hissait—tant physiquement que spirituellement—en ces hauteurs rarement égalées, et m'abordaient, non de crainte, mais dans un respect qu'il se devait de vouer, et que la peur n'aidait à desservir. Il en avait toujours été ainsi ; de mes engeances toutes plus dignes les unes que les autres, il incarnait le paroxysme de mes attentes, et avec elles, le prestigieux devoir des Awataguchi.
S'il me peinait de repenser aux malédictions cultivées par mon aîné, je n'en étais pas moins impartial, arrachant à cet impi—et toutes involontaires que furent ses erreurs—la moindre chance de souiller nos racines : il n'aurait été de plus infâme conclusion à ma direction que l'intronisation d'un indigne, tout fidèle qu'il me fut, car la noblesse d'âme ne suffisait à le tenir loin des maux. Je t'en remercie, et la voix se combla de quelques douces inflexions, témoignait de cette affection sans nulle égale : je tenais un amour similaire à l'ensemble de mes enfants, mais ne l'exprimais à tous avec la même équité, car ma fierté se voulait parfois fébrile.
Ces marques de reconnaissance constituaient l'apogée de mon humanisme, marquaient la frontière du chef et du père, du mentor et de l'affection, car alors, je n'avais plus rien de ce dirigeant dont je lui vantais les mérites. La passation ne serait immédiate : quelques cérémonies précéderaient la reconnaissance totale de l'autorité de Takumi, au cours desquelles, confrontant mon jugement aux vices de mon aîné, j'imposerai le choix qui était le mien, et de fait, immuable—et face auquel nul autre n'aurait son mot à dire.
Dans un geste si gracile que contrôlé, je quittais ma chaise pour retrouver la proximité de mon animal fétiche : tout indiscipliné et disgracieux qu'était cet âne, je m'étais attaché à son imperfection et tirais une affection toute particulière de ce qui constituait ses défauts. C'est en cela que je me sentais changé, pour ne dire sénile ; en ce sentimentalisme que je ne pouvais tenir que de l'âge, et qui me rendait inapte à prendre les meilleures décisions. Ma dernière, et la plus importante, hisserait Takumi en lieu et place de l'homme que d'aventure, j'avais longtemps été : un dirigeant inflexible et autoritaire, que nulle émotion ne soustrairait à son devoir.
J'aimerais ton opinion sur la position politique de notre clan, Takumi. En omettant l'aspect financier, non qu'il soit négligeable, et les revendications dérisoires des Shuusei, que penses-tu des Gyôkuji et des Yuutsu ?
D'une main distraite, je caressais la crinière de Roba, n'y trouvant là que le réconfort d'un contact animal.
S'il me peinait de repenser aux malédictions cultivées par mon aîné, je n'en étais pas moins impartial, arrachant à cet impi—et toutes involontaires que furent ses erreurs—la moindre chance de souiller nos racines : il n'aurait été de plus infâme conclusion à ma direction que l'intronisation d'un indigne, tout fidèle qu'il me fut, car la noblesse d'âme ne suffisait à le tenir loin des maux. Je t'en remercie, et la voix se combla de quelques douces inflexions, témoignait de cette affection sans nulle égale : je tenais un amour similaire à l'ensemble de mes enfants, mais ne l'exprimais à tous avec la même équité, car ma fierté se voulait parfois fébrile.
Ces marques de reconnaissance constituaient l'apogée de mon humanisme, marquaient la frontière du chef et du père, du mentor et de l'affection, car alors, je n'avais plus rien de ce dirigeant dont je lui vantais les mérites. La passation ne serait immédiate : quelques cérémonies précéderaient la reconnaissance totale de l'autorité de Takumi, au cours desquelles, confrontant mon jugement aux vices de mon aîné, j'imposerai le choix qui était le mien, et de fait, immuable—et face auquel nul autre n'aurait son mot à dire.
Dans un geste si gracile que contrôlé, je quittais ma chaise pour retrouver la proximité de mon animal fétiche : tout indiscipliné et disgracieux qu'était cet âne, je m'étais attaché à son imperfection et tirais une affection toute particulière de ce qui constituait ses défauts. C'est en cela que je me sentais changé, pour ne dire sénile ; en ce sentimentalisme que je ne pouvais tenir que de l'âge, et qui me rendait inapte à prendre les meilleures décisions. Ma dernière, et la plus importante, hisserait Takumi en lieu et place de l'homme que d'aventure, j'avais longtemps été : un dirigeant inflexible et autoritaire, que nulle émotion ne soustrairait à son devoir.
J'aimerais ton opinion sur la position politique de notre clan, Takumi. En omettant l'aspect financier, non qu'il soit négligeable, et les revendications dérisoires des Shuusei, que penses-tu des Gyôkuji et des Yuutsu ?
D'une main distraite, je caressais la crinière de Roba, n'y trouvant là que le réconfort d'un contact animal.
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