Dîner en tête à tête
Ça y est, tu es fiancé, c’est officiel. Le 24 décembre, cela a été acté et désormais, tu es promis à une femme et pas n’importe qui. Bientôt, tu épouseras Nadeshiko, alors même que tu n’en es pas amoureux, et que si les choses avaient été plus simples, elle aurait été promise à Himawari, ta sœur. Hélas, les choses ne fonctionnent pas comme ça et c’est toi qui dois faire honneur à ta famille en l’épousant. Tu n’as pas bronché, tu as accepté les fiançailles quand bien même tu n’as pas le choix.
Tu ne sais pas trop comment te comporter avec elle, tu ne sais pas si tu dois changer de comportement. Après tout, vous êtes amis, tu ne te sens donc pas mal à l’aise avec elle. La seule chose que tu espères, ce que tu ne seras pas forcé de l’embrasser ou de coucher avec elle car cela, il en est hors de question. Tu n’aimes pas toucher les autres de peur d’attraper des maladies. Alors avoir une telle proximité, même avec une amie, il en est hors de question. En attendant, tu n’as pas vraiment à penser à cela, la seule chose que tu dois faire, c’est te présenter au dîner en tête à tête que tu as proposé à Nadeshiko.
Tu as mis du temps à choisir ce que tu porterais, tu as hésité avec de nombreuses couleurs avant de finalement opter pour du noir, une couleur simple qui met tout le monde d’accord, d’après toi. Tu as même assorti ton masque pour l’occasion, entièrement noir. Car oui, tant qu’à faire, tu as aussi des masques de différents coloris et motifs. Fin prêt, tu n’as plus rejoindre Nadeshiko pour vous rendre au restaurant dans lequel vous avez réservé une table. Tu angoisses un petit peu sans vraiment savoir pourquoi.
Tu espères que rien ne changera entre Nade et toi, et que vous serez toujours les mêmes amis que vous avez toujours été. Tu espères aussi qu’elle est heureuse de t’épouser, ainsi, elle sera plus proche d’Himawari et aura plus de chance de se retrouver avec elle. Toi, tu n’es pas mécontent de l’épouser, tu l’apprécies, tu te dis qu’il y a toujours pire. Tu arrives enfin et croise le regard de Nade qui est déjà là. Tu te crispes un peu, espérant ne pas être en retard et tu l’as salut en te penchant légèrement en avant. Tu ne sais plus comment faire, maintenant que votre relation a changé.
-Bonsoir.
Est-ce que tu dois utiliser des surnoms affectifs à son égard, désormais ?
-Tu… Tu es très jolie.
Tu laisses échapper alors que tes joues se colorent légèrement de rouge. Tu essayes de te comporter davantage comme un compagnon digne de ce nom, mais tu as un peu l’impression d’être stupide.
-Tu vas bien ?
Tu demandes, tandis que vous vous dirigez vers le restaurant. Une fois arrivé, vous êtes amené dans un endroit privé afin d’y être tranquille et tu t’installes après que Nadeshiko s’est installée.
Et puis, tu n’étais pas fiancée à un parfait inconnu. Ce qui est plutôt pas mal, pas vrai ? Pas fiancée non plus à quelqu’un que tu méprisais, Akashi était quelqu’un que tu pouvais considérer comme ton ami. Vous n’étiez pas les plus proches des amis, mais sa présence ne t’était pas désagréable, ce qui était un plus. Cependant, ces fiançailles allaient changer entièrement votre dynamique. Il n’était plus question de se comporter comme de simples amis, puisque désormais vous étiez fiancés et destinés à vous marier. Vous devriez commencer à vous comporter comme un vrai couple, pas vrai ? Cette simple réalisation te faisait soupirer et, alors que tu te préparais pour le dîner en tête-à-tête auquel il t’avait invitée, tu te mis en tête que de toute façon tu avais prétendu pendant tant d’années être attirée par les hommes que ce ne serait pas compliqué. Plus simple, même, puisque tu n’aurais pas à l’embrasser et réprimer une grimace de dégoût à chaque fois. Tu finis très vite de te préparer, passe un dernier coup de rouge à lèvres, puis sort pour te diriger vers le restaurant où il avait réservé une table pour vous.
Tu serais peut-être en avance, le seras très probablement. Qu’importait, il valait mieux être en avance qu’en retard. Tu attendrais devant le restaurant, ce n’était pas très grave.
Au bout de longues minutes à attendre, tu vis une silhouette apparaître et se diriger dans ta direction. Tu lui souris faiblement en le voyant très clairement gêné, t’inclines à ton tour pour le saluer. Une tension s’était désormais installée entre vous et cela te dérangeait, bien qu’il n’y ait rien que tu puisses faire.
« Bonsoir Akashi. Tu es également très beau ce soir. »
Tu mords l’intérieur de ta joue pour ne pas rire devant sa gêne évidente, alors qu’une de tes mains descend pour effacer un pli sur ta robe blanche que tu avais décidé de porter. Tes pieds se mettent en marche pour le suivre, ton regard se pose sur le restaurant en face de vous où vous rentrez assez vite, vous dirigeant vers un endroit privé, loin d’oreilles indiscrètes.
« Je vais très bien merci, et toi ? »
Tu t’installes et poses à tes côtés la veste que tu avais emporté afin de ne pas être frigorifiée à attendre dans le froid. Ton regard se pose sur le jeune homme deux ans plus jeune que toi, désormais ton fiancé. Il était réellement mal à l’aise et ne semblait pas capable de se détendre, apparaissait soucieux de se comporter de façon correcte envers toi. Tu tends ta main pour la poser sur la sienne, la serre à peine en espérant que ton sourire qui se voulait réconfortant l’aide quelque peu à se calmer.
« Détends-toi, nous sommes entre nous. Personne n’est ici pour te juger, tout ira bien.»
Tu te redresses lorsqu’un serveur vous apporte la carte et le remercies après l’avoir prise, commences à détailler les différents plats proposés.
Comme le soleil, je t'illuminerai assez pour t'aveugler, et te passer l'envie de me provoquer davantage.
Tu n’es pas des plus à l’aise avec Nadeshiko, combien même tu la connais depuis un petit moment déjà. Non, tu ne la détestes pas. Avant d’être ta fiancée, elle était ton amie et tu appréciais de parfois passer du temps avec elle. Mais là, tout est différent. Il s’agit de ta future femme et tu ne peux plus te comporter comme avant. Tu sais pertinemment que tu dois faire de considérables efforts pour agir comme un bon mari, et ne pas attirer le déshonneur sur elle, et ta future famille.
Ce n’est pas aisé, tu n’as jamais eu de rendez-vous amoureux, toi. Tu n’as pas eu le temps d’en avoir, étant donné que tu as perdu à tout jamais l’occasion de te déclarer à ta meilleure-amie. Un souvenir encore très douloureux auquel tu préfères ne pas penser. Embarrassé, tu essayes tout de même de complimenter sa tenue. Tu trouves qu’elle a beaucoup de goût et tu veux le lui faire savoir. Néanmoins, tu n’agis pas comme tu le souhaiterais. Tu t’apparentes davantage à quelqu’un de pataud, qu'à une personne pleine de confiance avec son rendez-vous galant.
-Merci beaucoup…
Tu souffles en prenant place à table, après qu’elle s’est installée. Tu as fait des efforts pour te vêtir correctement, malgré la présence de ton masque duquel tu n’arriveras sûrement jamais à te séparer. Il n’y a aucune couleur, tu es entièrement habillé de noir, car tu n’as pas su comment marier correctement les couleurs. Il faut dire que ton allure ne t’a jamais vraiment inquiété, jusqu’à ce soir.
-Oui, ça va.
Tu ajoutes en hochant doucement la tête. Tu inspires profondément, le stress restant au fond de ton estomac. Tu n’es même pas sûr d’avoir vraiment faim. Mais pour ta fiancée, tu feras des efforts. Tu glisses ta main sur la carte et l’ouvre, consultant déjà les plats qui vous sont proposés et te demandant ce que tu devrais commander. Tu as envie de quelque chose de léger, des sushis, peut-être ? Tu es plongé dans tes pensées, tu en ignores même un peu Nadeshiko. Ce n’est pas très poli mais quand tu es concentré sur quelque chose, tu omets tout ce qui t’entoure. L’angoisse n’aide pas non plus.
Soudain, tu sens sa main se poser sur la tienne. Tu sursautes et lève les yeux immédiatement en direction de vos deux épidermes qui entrent en contact l’un avec l’autre. Cette simple proximité suffit à t’arracher un frisson de dégoût et par pu réflexe primaire, tu dégages tes doigts. La jeune Sugawara essaye de te rassurer, pourtant, tu n’as pu laisser plus longtemps sa peau sur le dos de ta main. Le contact physique t’écœure au plus haut point. Et même si tu veux être le meilleur fiancé possible pour elle, c’est plus fort que toi.
-Je n’ai jamais eu de rendez-vous galant.
Tu réponds honnêtement, peu connu pour être un menteur invétéré. Tu ramènes tes deux mains à toi pour éviter que Nadeshiko n’éprouve de nouveau le besoin de te toucher.
-Je veux honorer nos fiançailles, et être le meilleur pour toi.
Tu lui assures, tandis que tu plonges ton regard dans le sien. Tu portes encore ton masque car tant que tu n’auras pas de quoi manger devant toi, il ne sera pas nécessaire de l’enlever. Et puis, tu ne veux pas prendre le risque d’attraper les germes de ta future femme. D’ailleurs, tu ne peux t’empêcher de te saisir de ton gel hydroalcoolique – rangé dans la poche de ton pantalon – et de t’en verser sur les paumes pour les désinfecter.
-Est-ce que tu sais ce que tu vas manger ?
Tu finis par lui demander.
« Ne t'en fais pas, cela viendra avec le temps. Je suis sûre que tu feras un très bon fiancé, Akashi. »
Tu le vois prendre le gel hydro-alcoolique pour se désinfecter les mains et décide de retourner étudier la carte, prétextant ne pas savoir ce que tu allais prendre (faux, tu prenais généralement la même chose constamment, par habitude). Cela était si... étrange. Tu ne t'attendais pas à cela. Vous étiez amis, pas vrai ? Alors pourquoi est-ce que tout devait être aussi... tendu entre vous. Tu ne savais pas de quoi parler, parce que tu ne voulais pas réellement aborder le sujet de la soirée de fiançailles. Du futur mariage. Mais les discussions banales n'étaient pas de ton ressort non plus.
« Je pense prendre des soba. Et toi ? »
Tu reposes la carte et le regardes à nouveau, reprenant l'expression douce et calme que tu arborais précédemment. Ce n'était pas sa faute, il n'avait pas l'habitude de cela. Tu n'avais pas à lui en vouloir, d'être mal à l'aise, de ne pas savoir comment se comporter. C'était à toi de l'aider, à toi de faire en sorte qu'il ne voit pas cela comme une corvée.
« Désolée, j'aurais dû te demander avant de te toucher la main. Mais nous allons être mariés. » Faible rire s'échappe de tes lèvres, tu t'efforces de ne pas montrer que tu es mal à l'aise. Comment étiez-vous censé remplir votre devoir s'il n'arrivait même pas à te toucher la main ? « Cependant, nous irons à ton rythme, Akashi. Je ne souhaite pas te forcer à faire quoi que ce soit qui serait inconfortable pour toi. Nous allons passer le reste de notre vie ensemble, après tout. »
Dire les mots, à voix haute, pour la première fois depuis les fiançailles, avaient un poids entièrement différent. Tes épaules semblèrent soudain plus lourdes parce que ce que cela représentait réellement venait finalement de te frapper de plein fouet. Au moins, tu finirais avec quelqu'un que tu appréciais. Avec qui partager le lit ne serait pas une torture quotidienne.
Il y a toujours une solution, même les moins conventionnelles. Je suis sûr que chacun trouvera son compte dans cette histoire.
-Merci de croire en moi. Tu seras aussi une bonne fiancée.
Tu lui réponds en retard, sans oublier de la remercier. Tu penses vraiment que la vie aux côtés de Nadeshiko sera agréable. Après tout, c’est une très bonne amie à toi, et avant tout cela, vous vous entendiez déjà très bien. Il n’y a aucune raison que cela ne continue pas dans cette lancée, à condition qu’elle ne te touche pas de force comme elle vient de le faire.
-Je pense prendre des sushis, j’ai envie de poisson frais, aujourd’hui.
Tu ajoutes en retour, tandis que tu refermes la carte. Tu lèves le regard vers la jeune femme tandis qu’elle s’excuse de t’avoir touchée sans prévenir. Tu inspires profondément, grimaçant derrière ton masque, alors qu’elle termine sa phrase. Tu sais bien que vous allez être marié et à ce propos, il y a sûrement un moyen de s’en sortir sans avoir à se toucher, n’est-ce pas ?
-Ce n’est rien. Je n’aime juste pas être touché, que ce soit par toi, mes parents, ma sœur ou mes amis. Ce n’était pas contre toi, ça ne veut pas dire que je te déteste ou que tu me dégoûtes en tant que personne. Je t’apprécie beaucoup.
Tu la rassures, passant sous silence que c’est simplement tous les corps qui te rebutes. Tu finis par inspirer, continuant sur ta lancée.
-A propos de cela… Je suis heureux que tu mettes ça sur le tapis. Parce que même si nous allons à mon rythme, ce sera toujours inconfortable pour moi que tu me touches ou pire… dépose tes lèvres sur les miennes.
Tu lances en rougissant un peu devant cette idée.
-Mais nous pouvons trouver un moyen que nous n’ayons pas à nous toucher. Je sais que pour toi, cette relation ne sera jamais vraiment confortable parce que tu es homosexuelle et que tu aimes ma sœur. Et moi, je déteste être touché, ça ne sera facile pour aucun de nous deux.
Tu poursuis, toujours sans filtre.
-Nous pourrions finir par adopter un enfant, et cacher cela à nos familles. Il n’y aurait rien qui prouverait que ce n’est pas notre enfant et nous assurions notre descendance. Ainsi, nous n’aurions pas besoin de nous toucher. De toute manière, rien ne dit que je suis fertile, peut-être que je ne suis pas en mesure de faire des enfants.
Cela t’arrangerait un peu, au moins, ça te libérerait du fardeau de devoir coucher avec une femme. Rien que l’idée te dégoûte profondément ! Mais tu n’es pas sûr que cela soit véritablement la solution, tu ne veux pas être une honte pour ta famille et faillir à tes devoirs.
Cependant, cela fut de courte durée. Lorsqu'il expliqua son idée — d'adopter un enfant, de ne pas avoir à se toucher, ne pas avoir à avoir de relations sexuelles... Ton sang ne fit qu'un tour dans ton corps et tu te figeas brusquement, ton sourire disparaissant immédiatement de ton visage. Comment osait-il insinuer cela ? Adopter un enfant ? Toi ? C'était une honte ne serait-ce que de penser à le faire. Qu'importait qu'il était un homme et que tu sois amoureuse de sa sœur, ce n'était pas une raison. Pas le moins du monde.
Tes lèvres se pincèrent et tu n'essayas plus de garder une expression agréable et cordiale, le fusillant du regard. S'il n'était pas prêt à faire des efforts, était-il même digne de devenir un Sugawara ?
« Comment oses-tu proposer cela, Akashi. » Tu pris une grande inspiration, fermas les yeux le temps de reprendre une composition plus neutre. Il était hors de question que tu cèdes à tes émotions. Cela était inconcevable, encore plus en public, durant votre premier rendez-vous galant. « Mon orientation sexuelle n'a absolument rien à voir dedans. Je n'ai découvert que tard que j'étais attirée par les femmes et non les hommes, mais ce n'est qu'un infime détail dans ma position au sein de la famille, Akashi. Il est attendu de moi que j'ai un enfant de mon propre sang — ainsi que celui de mon mari. C'est un devoir et un honneur que de faire cela et jamais, au grand jamais, je ne songerai à élever un enfant qui n'est pas le mien. »
Ton corps s'était tendu et ta respiration arrêtée alors que tu avais prononcé ces mots, d'une voix doucereuse, faisant en sorte que personne d'autre que lui n'était capable de les entendre — car personne d'autre que lui ne devait les entendre, les comprendre.
« Plus jamais je ne t'entendrai prononcer ces mots. C'est un honneur pour toi d'avoir été choisi afin de m'accompagner dans cela. Tu es libre de faire ce que tu veux, en-dehors de notre mariage. Je ne t'en tiendrai rigueur car, après tout, moi aussi je ne pourrais me contenter de toi. Mais il est de ton devoir de coucher dans le même lit que moi et avoir ces relations. J'osais espérer que tu en étais conscient, avant que nos familles respectives ne se mettent d'accord pour cette alliance. Cependant, cela est désormais le cas. J'attends de toi que tu respectes ce devoir. »
Une fois ton discours fini, tu te forces à te détendre car tu aperçois les serveurs arriver, derrière ton fiancé, et le sourire de circonstance reprend sa place sur ton visage. Tu t'inclines et les remercies lorsqu'ils déposent les assiettes devant vous et prends les baguettes dans tes mains, regardas ton fiancé avec ce sourire toujours présent mais ton regard qui disait autre chose. « Bon appétit, Akashi. »
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