Une vague de passion faisait frémir vos corps, l’ardeur des chairs enlacées, les baisers humides sur une peau brûlante de désir. Souffles erratiques, douces caresses, murmures amoureux : comme un secret que vous vouliez garder seulement pour vous, les regards liés d’un sentiment que vous ne pouviez pas oublier. A nouveau dans ses bras, là où tu te sentais le mieux, le cœur battant sous l’amour qu’il t’offrait, sous les sensations qui consumaient ton âme. Un baiser sur ses lèvres brunies, sur son coup mielleux, sur cet être qui était tien : sur cet homme que plus jamais tu ne pourrais quitter. La nuit enlaçait vos échanges, une douce chaleur caressant vos peaux transpirantes, vos cœurs transis d’un amour que vous ne pouviez plus contrôler.

Et vous vous perdiez, l’un dans les bras de l’autre.
Et il t’appartenait enfin, Rajan.

Le soleil se glissant sur vos peaux, encore rêveuse de la nuit passée, d’un temps retrouvé : comme si ces années sans lui n’avaient jamais existé. Rajan, il n’y avait que lui, idylle à nouveau atteinte, amour que plus jamais tu ne laisserais tomber, homme qui à tout jamais serait à tes côtés. Parce que tu avais choisi, tu avais accepté qu’il fasse de toi sa dulcinée : car Shion, tu n’avais pas hésité à retourner dans ces bras.

Tu lui appartenais.
Désormais, tu ne pouvais plus lui échapper.
Et il ne pouvait plus te lâcher.
Pour toujours, il serait à tes côtés.
A jamais, pour l’éternité.

Un souffle, une voix qui faisait frémir ton cœur, et tes yeux rencontraient les siens, plongeant dans ce regard dont tu étais si amoureuse. « Bonjour. » Un sourire ornait tes lèvres, un baiser sur les siennes, une main caressant son avant-bras pour lier vos mains alors qu’il t’embrassait à son tour. « J’adore quand tu m’embrasses comme ça. » Un rire, tendre, aussi doux que le regard que tu lui portais. « Merci. » Tu te redressais, couverte d’un drap seulement, tu te fichais bien d’afficher ta nudité désormais : parce qu’il te connaissait par cœur. « Il n’y a qu’avec toi que j’arrive à boire du café. »

Elle avait rêvé de lui toute sa vie durant, désireuse de retrouver cet homme qu’elle n’avait jamais cessé d’aimer, celui dont la perte avait été si difficile qu’elle s’était perdue. Le destin avait voulu l’arracher à son coeur, éloigner son bonheur, enchaînée à un nom : aux Fujiwara. Shion aurait voulu briser la roue, fuir son sang et ne plus craindre les cieux. Seulement, elle avait préféré le perdre, lui offrir son rêve plutôt que de lui retirer, même si pour cela elle avait dû se briser. Désormais elle était dans ses bras, à jamais, car plus jamais elle ne les quitterait, plus jamais elle ne se laisserait berner par le destin, quitte à perdre tout ce qu’elle avait, car tout ce qui comptait à ses yeux : c’était lui.

Rajan.

Désespérée, elle avait voulu tout jeter, oublier son passé : ne plus jamais y penser. Shion ne pensait pas le revoir un jour, âme en peine, égarée dans les abîmes. Elle remerciait les dieux de lui avoir rendu, que Rajan soit à nouveau à ses côtés, elle semblait revivre enfin. Il était là, il était là, il était là.

Son Rajan, elle ne le quitterait plus.
Plus jamais elle ne le laisserait partir.
Ils étaient liés, ils le resteraient, qu’importe le destin.

Un doux sourire en guise de réponse, elle ne savait pas réellement, le café avait un goût de nostalgie dont elle n’arrivait pas à s’extraire, habituée à l’amertume qu’elle répugnait tant. Je fais aussi énormément de chose que j’aime. Une gorgée de sa boisson, elle observait la tasse d’un air absent. Et tu m’en fais aimer beaucoup. Sauf le café, c’est amer et je n’aime pas ça, pourtant, j’ai envie d’en boire. C’est bête, elle le savait, elle s’en fichait bien, la logique l’avait quitté depuis longtemps. Sa robe sur ses jambes, elle l’enfilait pour se défaire du lit, loin d’être pudique en la présence de Rajan, le frais ne lui donnait pas envie de rester nue. Ses mains sur son corps, caressant son ventre, lui qui semblait enclin à quelques douleurs qu’elle ne comprenait pas. J’ai des nausées ces jours-ci. Elle chuchotait ces mots, comme un secret. Surtout le matin, je ne comprends pas, je ne pense pas être malade pourtant, mais il m’arrive d’avoir des douleurs, des crampes d’estomac peut-être ? Ses mains se posèrent sur les siennes, caressant de son pouce la peau brunie. Peut-être que je devrais aller voir un médecin ?

Son esprit était brouillé par une mémoire oubliée, des souvenirs craquelés apparaissant comme des fantômes du passé, Shion ne pouvait plus que se rattacher à son aimé. Comme une droguée en manque, elle ne voyait plus que lui, n’osant un regard vers sa famille ou ses amis, coupée du monde par l’amour qu’elle lui portait : elle n’avait plus de Rajan dans ses pensées. Au fond d’elle, Shion savait que ce n’était pas bon, qu’elle devrait ouvrir ses horizons, mais trop longtemps éloignés : elle avait ce besoin primaire de le retrouver.

Ses lèvres caressaient les bords de la tasse, habitude qu’elle avait avant de boire du café, appréhendant l’amertume qu’elle redoutait mais dont elle ne pouvait plus se passer. Cela fait dix ans que j’en bois. Elle disait cela d’une voix douce mais pourtant si lointaine, le regard perdu sur le café. C’est devenue une habitude, alors ça ne me dérange pas. Je ne me sens pas obligée d’en boire, c’est simplement une envie bien que je déteste ça. Elle aimait bien le thé aux notes fruités, tout comme ceux plus végétaux : bien qu’elle fut habituée à l’amertume de certaines feuilles, elle ne savait pas aimer cette boisson que Rajan pourtant appréciait.

La main halée sur son ventre lui provoquait quelques rougeurs, Shion était loin d’être pudique face à Rajan, seulement elle avait le sentiment qu’elle n’était peut-être pas simplement malade. Que veux-tu dire par là ? Doucement, son regard se portait sur son propre corps, du bout des doigts, elle caressait cette zone si significative. Maintenant qu’il le disait, jamais ils ne s’étaient protégés, et elle le réalisait tout juste. Mon dieu. Murmure presque silencieux, elle regardait Rajan d’un air à la fois surpris et paniquée. Tu penses que je suis enceinte ? C’était peu croyable, aussi beau qu’effrayant : car elle ne pourrait plus se cacher aux yeux du monde : aux yeux des Fujiwara. C’est impossible, je le sentirais non ? Je n’ai que quelques petites nausées irrégulières pourtant… Elle voulait y croire.

En son esprit se bousculait les informations qu’elle possédait désormais, le cœur en vrille alors qu’elle caressait tendrement son ventre, dans un geste léger par peur de briser l’enfant qu’elle portait peut-être.
Elle portait peut-être en son sein le fruit d’un amour trop longtemps désiré, trop longtemps oublié. Et elle sentait des chaînes enserrer son cou, mais elle aimait ça, elle adorait cette sensation d’emprisonnement lorsque c’était lui, parce que plus jamais elle ne pourrait le quitter, parce que désormais c’était pour l’éternité.

Shion ne savait pas si cela était vrai, elle l’espérait, elle en rêvait. Cet enfant, elle en voulait tant qu’elle pourrait lui demander de recommencer, encore et encore, jusqu’à qu’elle soit certaine qu’il soit bien là, qu’ils soient à jamais lié.
Sans possibilité de s’échapper.
Sans moyen de fuir l’amour qui désormais était à leur porté.

Je l’espère, j’aimerais tant porter ton enfant. Ses lèvres se courbaient en un doux sourire, sa main toujours posée sur son ventre alors qu’elle profitait du baiser que son bien-aimé lui offrait. Oui, allons-y dès que possible. Car elle avait besoin de savoir, de se dire que jamais ils ne seraient séparés, que cette fois-ci, ils seraient à jamais liés.
Parce qu’elle l’aimait.
Comme jamais elle n’aimerait quiconque.
Car Rajan était l’homme de sa vie.
La raison de son existence.
Merci mon amour. Elle attrapait ses vêtements, s’habillant finalement, avant de s’approcher de Rajan pour déposer un baiser au creux de son cou. Je t’aime, et je t’aimerais pour l’éternité.
Et lui aussi.
Car il n’en avait plus le choix.