ne m’arrête pas. ma culpabilité me ronge d’autant plus. la charge me revient en partie, sora, je caresse le rêve éclaté d’être en mesure de protéger. ma main le serre et ses débris tranche ma paume, il est imprégné de l’hémoglobine de mes souffrances. tu la connais, sora. cette culpabilité qui ronge sans raison, qui assassine même lorsqu’on en est le responsable — on partage cet affreux sentiment créés par nos géniteurs. Même si ceci découle de ta décision, j'aurais aimé au moins être une aide. laisse-moi ma part. un sourire se décroche à la poursuite de mes propos Les messes basses ne dureront pas, ils s'y habitueront et ne se souviendront même plus ce à quoi tu ressemblais avec deux yeux. sois heureux, je préférais de loin qu'on murmure qu'il me manque un œil plutôt que d'être reconnu comme un cracmol.

j'ai un rire qui s'échappe, moqueur mais sans méchanceté, qui ricoche contre ta tentative narcissique Ah ! déjà faudrait-il être mystérieux et ténébreux de base pour être ce que tu réclames. à mes yeux tu n'es rien de tout ça. tu es le gamin souriant, le joueur téméraire, le génie taquin. je ne te connais pas ainsi, sora. même enfermé, il m'est aisé de percevoir tout ceci en toi — ça ne t'a quitté. ta rébellion est sombre, mais je sais que, au bout du compte, elle t'inondera de lueur.

tu as le temps, sora. un jour, j'en suis persuadé, tout ira mieux. tu seras en mesure de vaincre le monde qui t'enchaîne, je le crois dur comme le fer. En fait, t'avoir comme nouveau colocataire ne me changera point des Tsukino : tu es devenu aussi vaniteux qu'eux durant cet été. et t'inonder de railleries est si plaisant car rien ne change, finalement. derrière la plaisanterie se loge mon conflit — apaisé par des instants allègres. vois, les tumultes ne grondent pas toujours, même présentes.

tu clos le débat.
en premier lieu il n'avait raison d'être. je me lynche. simplement. sans cesse. à vrai dire je me souviens pas. quand je suis devenu ainsi. sûrement depuis le jour où il m'a fallu m'excuser de ma simple existence.
c'est marrant.
de devoir demander pardon pour avoir été mis au monde. contre son gré. heureusement que toi. sora. tu ne t'es rabaissé à ça. tu as claqué la porte. tu ne plies pas. moi j'ai que de la gentillesse maladroite. c'est pas plus mal.

évidemment que je suis l'unique à te connaître. je suis ton cousin. cependant, et si tu commençais à simplement accepter cette attention ? mon conseil te déplaira. qui sait. je doute que tous les yeux rivés sur toi soient uniquement des messes basses. tu possèdes de fabuleuses aptitudes et tu as combattu courageusement. chasse l'idée que le monde est hostile. il est vaste. remplit de bonnes âmes. de personne qui t'admireront. qui te détesteront. qui t'aimeront. ainsi est la vie.
au pire. le seul regard qui devrait t'importer est. celui de yoru. d'asano. le mien. des yeux où il est impossible que tu n'existes pas.

ah tu as tiqué à ma remarque. ils ont bon fond si tu les connais. une pause enfin, je ne parle que d'ishvar et ishan, je ne saurais me prononcer sur le reste — je n'en suis pas proche et puis moi tu sais. je ne sais voir que le positif. et aucun de deux ne s'est jamais moqué de ma minable magie. ni rabaisser. ni traiter mon existence comme une erreur. ça me suffit.

pourquoi tu te braques, sora.
pourquoi tu déformes le fond de mes propos. pourquoi tu cherches le mal en eux. cette défensive soudaine. ne me laisse choix que de te brusquer. mais qui ne voudrait pas ressembler à notre cher kazuya ? le ton s'inonde d'ironie. violent. intimidant. vilain par nature. affreux personnage. l'homme idéal. les sourcils se haussent. les mots manquent de se briser en rire. comment oses-tu dire que tu lui ressembles ? tu ne seras jamais un connard à sa hauteur. un chic type comme toi ne peut prétendre à cela. les lèvres tirées en un sourire qui ne s'évanouit. je ris. satisfait.

j'écoute. s'aiguise l'ouïe afin de récolter les non-dits dans les prononciations, les silences et les tons. dans quelles contrées, sora, t'es-tu égaré ? dans des prés contradictoires, dans des lisières qui sont cages, dans des champs semés par tes soins et d'autres d'exigences. tu as braqué tes émotions. nouées dans ta gorge. tu quêtes la perfection. la perfection modelée selon les frayeurs et les croyance qui gîtent sous ta poitrine — si lointaines de ton père — et tout écart t'abîme. toi, blond. je ris spontanément je payerai cher pour te voir avec une chevelure dorée. et tu poursuis sous ces ressemblances. sous ces airs de famille. sous ces liens de sang qui unissent.
parfois, ces questions m'habitent.
souvent, de mes esprits, je les bannis.

pas vraiment. oh, je m'entends bien avec certains, au grand damne d'autres ; mais je crois que ce n'est dû qu'à mon caractère. une brève pause j'ai blanchi mes cheveux par défiance. tu le sais. et ressembler physiquement à mon père m'insupportait — alors je comprends ton envie de tout faire pour t'écarter du tien. ce miroir plus âgé te rappelait à quel point tu étais pathétique. inutile. raté. en réalité, je ne me sens ni nishimura ni fujiwara. pour les uns, je suis un échec. pour les autres, je suis un étranger même si nous partageons le même sang. et mon sourire se brise dans une confession ne t'en fais. moi aussi, j'aurais aimé naître moldu chez eux, ne serais-je pas normal ? dénué de grande magie, dénué d'impressionnants pouvoirs. mais il est impossible de devenir quelqu'un d'autre. il faut tirer le bon de l'existence avec laquelle on nait. et, peut-être, la prochaine sera moins douloureuse. je t'offre un sourire réconfortant. des idéaux positifs. des espoirs qui sont phares dans nos nuits les plus noires. maintenant, peut-être, tout va de travers, mais on ne sait ce que l'avenir nous réserve, sora. le feu de casser nos chaînes n'incendie-t-il pas nos poitrines ? la flamme de jours meilleurs garde au chaud nos cœurs frigorifiés par la froideur de notre univers. un brasier nous consomme — la vie. aies foi en toi.

ah je ris tu comptes laisser sans un rond ton malheureux cousin ? c'est cher payé la couleur de cheveux. mes doigts étirent une paupière. faussement soucieux de terminer mendiant. mais le sourire s'étire un peu plus quand tu déclares. si vivement. si fermement. avoir foi. et il s'étire encore. embarrassé par ce que tu rajoutes. mais se ravise de sérieux quand tes dires deviennent graves. quand ce sujet est abordé. si soigneusement évité toutes ces années. si sensible. et tu nourris l'espoir dans ma carcasse. de croire en le changement. de croire en une nouvelle ère. où respirer serait possible. où exister serait possible.

mais tes révélations ne s'arrêtent ici. elles poursuivent. et tu dégueules d'affreuses vérités. de sidérantes réalités. et le sourire définitivement se dissipe. médusé, penser devient compliqué. intégrer cette confidence. réaliser l'ampleur et les conséquences. et j'aimerais te demander. pourquoi t'être mis dans pareille situation. pourquoi t'être jeté dans tel péril. pourquoi avoir confronté quand l'issue était si prévisible. pourquoi chercher à te foutre en l'air. pourquoi t'es-tu infligé cela. résonne. un reproche. que seule famille peut se proférer. mais il s'arrête ici. à quoi bon te réprimander. il est trop tard. le mal est fait. le mal t'a été fait.

ça m’écœure. de savoir ce secret. car il est sinistre. vil. et ce n'est que preuve. preuve de l'horreur qu'est notre famille. ... je suis étonné que tu aies réussi à le garder pour toi aussi longtemps. je suppose que c'est dans notre sang. cette aisance de se dissimuler le plus important. le plus lourd. le plus étouffant. est-ce que tu vas le lui dire ? un petit silence. à asano. j'imagine que tu ne lui as rien dit. cette information, je n'en sais que faire. si soudaine qu'elle m'est irréelle. mes mains se rejoignent contre mon visage. elles se plaquent contre mon nez. à yoru non plus, hein. j'essaie de comprendre. mais soudainement. sora. tout m'échappe. et je ne sais pas. quel réconfort t'offrir.

pour être libre, est-ce que pour être libre, faut-il constamment s’armer de défiance. faire front front et  front. au meilleur cas, l’adversaire meurt. au pire, tu meurs. un héritier se remplace. ce chef nous a volé notre humanité, transformés en pièces utilisables et jetables à sa guise. et, même si toutes les preuves se faisaient répandre par les quatre coins du pays, ce monstre serait-il puni ? les clans fonctionnent ainsi. il faut salir ses mains lorsque la proie est inatteignable.
tes mots se poursuivent. imbibés de raison. à quoi bon dire la vérité. notre sang ne sait que la dissimuler. espérer qu’elle soit oubliée. qu’elle finisse dans des abysses où nul ne s’aventure. mais que fais-tu si elle finit par faire surface, qu’importe tous tes efforts. il faut que je te mène. te poser les questions délicates. m’assurer que le chemin choisit soit prospère et sans encombres. je suis d’avis de ne rien dire, cependant cela ne m’empêche de regarder de possibles avenirs. s’ils le découvrent, que faisons-nous ? nions-le nous ? et si ton père dévoile à l’un ce secret, prétendrons-nous de ne rien savoir ? tout est une bataille. tout n’est qu’un plan s’imaginant méticuleusement. et qu’il tienne ou qu’il chavire. le destin choisit. tout n’est que pari. au final.

comment empêcher qu’ils ne l’apprennent ? ne sois pas atlas, sora. ta vie ne tient qu’à un fil s’évaderait presque de mes lèvres. ton entourage sert à cela. conseiller, porter tes fardeaux, se débarrasser de ce qui t’es gênant. je suis là. je suppose. en retard. pris de court. la cervelle pensant plus vite qu’elle ne peut.
plus vite que ne se tisse les mirages de libertés.
plus vite pour réparer la casse. que feras-tu s’il l’utilises pour te manipuler ? oh sora ton père piétinerait tout ce qui se trouve sous sa semelle si celui lui permet de te soumettre.