Summer time

25.07.96

L’eau a toujours cet effet sur lui, il n’est pas rare de le voir s’approcher d’un lac, une rivière ou de la plage rejoignant la mer. D’une certaine façon il se délecte plus de l’écume salée qui s’effaçait dans le rivage au rythme régulier des vagues que de la force immense que possédait l’océan dans la plus grande discrétion aux yeux de tous.

Il marche pour passer le temps se berçant des remous et du sable qu’il piétine pour en entendre et sentir les grains s’affaisser sous son poids en laissant ses pensées se faire emporter à leur tour. Sur son chemin il percute quelqu’un sans le voir vraiment et lève le nez vers son frère. Ils s’étaient donné rendez-vous pour profiter d’un instant hors des murs de leurs demeures respectives, de celles communes aux Awataguchi et de leurs dortoirs différents. Leurs deux années d’écart n’avaient pas tant creusé leur lien. Ils étaient si contraires qu’ils avaient tout à apprendre l’un de l’autre. N’était-ce pas ce pour quoi leur clan tenait aux alliances par mariage et à la bonne entente avec toutes les familles ? Hanru l’observe et remarque l’instrument à sa main, comprenant qu’il allait avoir le luxe de l’écouter s’exercer en espérant qu’il ait assez de patience pour supporter les ratés. Mais il savait que Tasha possédait à l’instar de lui une fibre artistique assez bonne et qu’il n’oserait jamais lever la voix ou la main sur son frère pour quelque raison que ce soit. « Tu comptes jouer un morceau ? » c’était la première question d’une longue série qu’il se réservait pour plus tard, pendant que le cadet leur trouve un coin idéal pour se poser et profiter du temps qui bientôt ne serait plus aussi clément.

Une fois assis, ses os craquent par de petits étirements avant qu’un soupire ne passe et qu’il le dévisage sans le vouloir, sans doute trop intensément, clairement dans l’attente de quelque chose. Mais Hanru ne suggère rien et se contente d’exiger que l’on comprenne sans avoir à dire un mot, bien qu’il le fera si ça devait traîner. Aucun agacement ni animosité ne venait rider le visage lisse du sabreur, signe que rien ne pressait, rien n’était grave, ils avaient tout leur temps. Il était rare que ces deux-là puissent se réunir et ils avaient depuis longtemps oublié l’idée d’être plus unis avec les deux ainés de leur famille de six.