No need to cry, I'll always be here
09.11.97
La magie était rassurante, un confort dont il ne se laissait pas tant le climat à l’intérieur était tempéré en comparaison du paysage au-dehors. Hanru ne s’en soucia qu’un court instant, parcourant les couloirs pour aller de salle en salle et écouter les prochains cours. Il n’appréciait pas la monotonie et la redondance de ces moments malgré les nouvelles connaissances emmagasinées. Ce pour quoi lorsque ce fut terminé, il projeta d’aller se défouler sur le terrain d’entraînement comme chaque soir. Parfois plus tard, d’autres il devait se rendre au club dont il faisait partie. Mais en cette fin d’après-midi, sa manche refusa de suivre la cadence de sa marche. Il baissa la tête pour observer la silhouette fluette d’une demoiselle qu’il connaissait bien assez. Jie Lian Fujiwara. Son nom suffisait à lui seul à attirer les regards et chacun voulait être dans ses bonnes grâces. L’Awataguchi le premier avait pensé à son avenir et celui de son clan, mais il savait pertinemment qu’il n’aurait pu rejeter une enfant que ce soit par principe ou parce qu’on le lui aurait demandé.
Une fois la manche lâchée, il porta sa main sur la tête de la plus jeune pour une unique caresse. « Jie Lian » dit-il en acquiesçant, attendant la requête qui allait suivre. Sa première rencontre lui avait appris que le japonais semblait une langue compliquée pour quiconque n’en était pas natif. Il s’était contenté de la rassurer en lui indiquant le chemin et l’accompagnant au vu de la panique qu’elle avait clairement affichée en croyant qu’il allait l’abandonner à son sort. Il aurait pu s’il avait été élevé autrement. Il avait entendu dire cependant qu’elle avait progressé et il l’avait constaté lui-même, un moyen peut-être d’échapper à la petite main qu’il saisissait pour la guider et le menait tout droit à des occupations qui n’étaient pas les siennes. Il n’allait pourtant pas se mentir à lui-même en prétendant que ça n’était pas agréable. Avec Jie il avait l’impression de rattraper le temps qu’il n’avait pas pu avoir avec son petit frère, même si la culpabilité que ça ne soit pas vraiment lui et d’en faire profiter d’autres venait parfois s’immiscer dans ses pensées. « Tu te débrouilles assez pour ne plus avoir besoin de mon aide il parait » dit-il dans un sourire qui se voulait rassurant, l’avait-il était une seule fois cependant avec un père qui ne lui en avait accordé aussi peu ? Il avait beau savoir la différence entre les expressions qu’il offrait, il ne la faisait pas entre adulte et enfant, c’était bien là son défaut.
Et, elle avait un sentiment de réussite, depuis quelques temps, parce qu’elle se sentait aimée, bien plus qu’elle ne le croyait. Maintenant qu’elle avait dépassé les difficultés de la langue, qu’elle pouvait s’exprimer assez pour être comprise – bien que l’écriture soit toujours un démon pour elle. Jie Lian se sentait chanceuse, un peu méritante, car Suiren, Eirin, Ryuu, son père, peut-être même Miyuki, ils l’acceptaient d’une certaine manière : elle était une Fujiwara.
Elle était heureuse, car quelques personnes l’avaient aidé : Xue-gege notamment mais aussi Hanru-gege.
Elle s’était contentée d’attraper la manche de son vêtement, ses yeux clairs plongeants dans ceux de son aîné, dans une demande muette de l’accompagnée comme à leur habitude.
Pourtant, alors que ses lèvres s’étaient courbées en un sourire bienheureux à la caresse de son aîné, son visage se déforma d’une grande tristesse à la suite de ses mots.
Elle avait ce petit sentiment d’abandon qui grandissait dans son cœur.
Comme s’il ne voulait plus d’elle et de son caprice silencieux.
No need to cry, I'll always be here
09.11.97
Le sourire s’évapora aussi vite qu’il était apparu et le poids sur sa manche se déplaça au creux de son estomac. Il avait oublié l’âge innocent de son interlocutrice et la difficulté à saisir la nuance dans sa voix et son sourire qu’ils voulaient fière. À l’instar d’un amusement complice, c’est la tristesse d’un rejet de sa part que Jie Lian essuyait et pourtant il ne l’avait nullement souhaité. Immobile, il ne sait comment rattraper sa bêtise en la voyant lutter pour ne pas fondre.
Une bien belle réaction que lui-même n’aurait pas eu la sagesse d’avoir si jeune. Hanru se baissa au niveau de sa cadette. « Ce n’est pas… » ce qu’il voulait dire. Non, ce n’était pas la façon dont il voulait le dire plutôt. « Je voulais te féliciter » expliciter ses propres paroles le rendait confus et plus encore en se disant qu’il avait fait pleurer une personne pour si peu.
Son sourire s’était crispé en laissant apparaître sur une joue un semblant de fossette. Afin de ne pas lui offrir de grimace qui pourrait être mal interprétée, le brun se saisit avec douceur des hanches de l’enfant et se redresse en même temps de toute sa hauteur, la plaçant sur ses épaules. « Je ne voulais pas te faire de peine. Tu as besoin de quelque chose ? » les mots n’auraient d’impact que s’il agissait en conséquence, alors plutôt que de s’excuser, l’Awataguchi se permit d’anticiper, levant la tête vers la plus jeune, symboliquement au-dessus de tous. Cette fois plus serein, il lui sourit en espérant voir les larmes s’effacer progressivement au profit d’une image plus joyeuse.
La vie de sang pur n’avait rien d’évident, particulièrement pour ceux qui ne parlaient pas japonais et se retrouvaient ici. Aussi adorables soient-ils, le traitement était le même et pour Hanru qui le comprenait parfaitement, ajouter un poids sur les épaules de la demoiselle pourrait faire basculer complètement le caractère tendre qu’il lui connaissait. Pour rien au monde il ne voulait en être responsable. Et s’il fallait pour cela être à la merci d’une Fujiwara, qu’il en soit ainsi.
Les apparences sont importantes et dans les yeux de l’enfant il était question d’amitié et de fraternité. À cette vision, il fallait ajouter l’aspect relationnel des familles pour Hanru. Quant au monde présent, peut-être pensaient-ils qu’il s’y soumettait sans condition. Il y avait bien d’autres dimensions à cette scène qu’ils n’envisageaient pas, ni les témoins, ni Jie, ni Hanru et pour ce dernier ça n’avait aucune importance.
Elle se devait d’être une fierté pour son père, pour Suiren, pour les Fujiwara.
Ne pas être un poids, mais elle n’arrivait pas encore à tout saisir des devoirs qui étaient désormais siens.
Doucement, Jie Lian prenait une plus grande respiration.
Elle voulait qu’il l’accompagne sans réelle raison, ou simplement pour qu’elle ne soit pas seule dans les longs couloirs de l’école. Jie Lian baissait la tête, hésitant sur la demande qu’elle voudrait le plus faire à l’Awataguchi.
Puis, la petite pointa devant elle, avant de laisser sa main retomber sur la tête du plus vieux.
No need to cry, I'll always be here
09.11.97
Si les pleurs l’insupportaient d’ordinaire, ce n’était pas par dégout, mais parce qu’il ne voulait pas en être la cause. Et concernant Jie Lian, il n’avait pas eu la bonne formulation visiblement, oubliant parfois qu’elle était encore jeune et peu encline à son humour qui – on ne se le cachera pas – était défectueux plus que subtil. Aussi, pour se faire pardonner, il l’avait prise sur ses épaules délicatement, de sorte à lui faire comprendre qu’il n’avait pas eu l’intention de la rejeter une seule seconde. « Oui te féliciter, tu as fait de beaux progrès, je suis fier de toi » et il n’avait aucune honte à le lui dire de but en blanc contre toute attente. Hanru n’était pas du genre à mâcher ses mots, peu importe les circonstances, cependant il fallait trouver les bons. Là était son problème majeur. Avait-il réussi cette fois ? Son effort avait surement payé, en tout cas il était parvenu à calmer la demoiselle suffisamment pour qu’elle ne le pense pas monstrueux.
Tout en lui jetant un petit regard de sa hauteur, il pose une main près d’elle pour l’assurer, de sorte qu’elle ne tombe pas dans le processus et de sa main libre, dénoue le ruban qui maintenait ses cheveux en queue de cheval. Il le lui confie et explique en même temps « Que je ne te fasse pas mal » ou que ça ne la dérange pas en tout cas.
Il n’y avait pas de raison apparente pour le voir et elle n’en avait pas vraiment besoin, sa compagnie était toujours apaisante pour Hanru qui avait peu l’habitude des enfants. Même s’il n’avait rien contre, la majorité lui tapait sur le système et il préférait les fuir. Lui aussi avait été jeune, mais relativement calme selon le comportement général des plus petits. Jie Lian semblait être de ceux-là aussi. « Alors Gege va t’aider et rester avec toi meimei » si la demoiselle avait pour coutume de l’appeler grand frère dans sa langue maternelle, il avait fait l’effort de lui rendre son affection en apprenant quelques mots. Cependant, lorsqu’elle lui parla complètement en mandarin, il ne sut que répondre. « hm ? » lui sembla une réponse correcte pour qu’elle répète, bien que ça n’était pas clair non plus.
La petite main projeta son ombre sur son visage et il comprit où elle voulait en venir, acquiesçant. Elle devait avoir ses livres avec elle et partant de ce principe, Hanru marcha prudemment sans se précipiter pour traverser le couloir et se frayer un passage loin de la foule pour gagner les jardins. « Personne ne t’a embêté j’espère ? » sait-on jamais, si quelques téméraires avaient l’audace de s’en prendre aux plus jeunes, l’Awataguchi n’était pas certain d’intervenir, mais pour ses connaissances et amis, il en était bien capable. Triste réalité pour ceux qui ne l’avaient pas approché aussi naturellement que la Fujiwara.
Elle désirait plus que tout rendre ceux qu’elle aime fiers, savoir qu’il l’était lui donnait un sentiment joyeux ravissant son cœur. Car Jie Lian avait peur de ne pas être à la hauteur du nom qui était désormais le sien, bien qu’accepter par les siens, elle ne voulait pas devenir la honte des Fujiwara.
Mais être totalement reconnue comme la fille du chef, comme une Fujiwara a part entière.
De ses mains, elle attrapait le ruban que le garçon lui tendait, jouant avec de longues secondes avant de replacer ses mains dans ses cheveux pour les tortiller dans tous les sens.
Elle aimait bien faire ça.
Mais la joie explosa lorsqu’il l’appela meimei, et Jie Lian fut si heureuse qu’elle lâcha un petit cri heureux.
Le ruban était joli, alors elle finit par l’attacher dans ses propres cheveux, car il était bien plus pratique que de le tenir dans ses mains.
No need to cry, I'll always be here
09.11.97
Sur le visage de la plus jeune se dessine un sourire capable d’illuminer tout un monde d’obscurité. Hanru était fasciné par peu de choses et il associait ses sentiments au calme ou à la tempête d’une mer capricieuse et égoïste de dévoiler ses sentiments par quelques émotions tout en conservant les nuances secrètes. Sa palette n’était en somme pas tant développer au regard de ceux qui ne s’y attardaient pas. Mais il esquissa un sourire, apaisé par la joie communicative de l’enfant. Il était en réalité rassuré de ne pas l’avoir blessé, car pour rien au monde il n’aurait souhaité être synonyme de tristesse et de méchanceté. Il savait parfaitement que c’était en lien avec son ressenti, voulant épargner la vie compliquée des sangs purs au profit de l’innocence de la jeune kitsune.
Il l’avait appelée sa petite sœur et ça n’était pas bien compliqué de deviner qui pouvait lui apprendre quelques mots. Si le lien entretenu avec le chinois n’était pas aussi proche que Jie Lien et lui semblaient l’être, il se permettait parfois d’aller vers lui pour faire cet effort essentiellement pour elle et il n’était pas peu fier d’avoir eu cette idée en voyant sa réaction. « Oui, je lui demande pour te comprendre mieux » dit-il en prenant le temps d’articuler tandis qu’ils arrivaient au jardin bientôt. Personne ne semblait s’en prendre à la Fujiwara, son nom y étant sans doute pour quelque chose et son paternel par la même occasion, forçant le respect et les intimidant tous. Tous ? Non, visiblement une personne avait décidé de défier l’autorité du chef de clan et fort heureusement, les conséquences ne seraient sans doute pas d’ordres politiques. Hanru se stoppe un instant, mais reprend et s’assoit sur le banc afin de récupérer la renarde sur ses genoux. « hm… Tu as de quoi dessiner ? Je pense que Miyuki s’est trompé » dit-il simplement en contenant de tout le sang-froid dont il était capable, son envie d’aller trouver le concerné pour lui faire la tête au carré. Quand la question lui fut retournée cependant, il fut surpris, mais secoua la tête négativement. « Personne ne peut embêter gege » doucement, il tire sur le nœud fait avec son propre ruban et lui glisse « il te va bien, tu veux le garder ? » ses cheveux longs dévalant ses épaules et venant parfois caresser le visage de l’enfant pour la chatouiller.
Elle voulait simplement devenir la meilleure pour eux.
Pour elle également.
Mais essentiellement pour qu’ils soient fiers de ses progrès. Qu’ils n’aient nuls regrets de l’avoir récupéré.
Sur les genoux de son gege, Jie Lian hochait vigoureusement la tête, sortant de son sac de quoi faire, elle commence à faire un dessin avant de le gommer, incertaine. Il lui semblait très difficile de décrire ce qu’elle voulait exprimer, et peut-être est-ce pour cela que Miyuki s’était trompé, n’avait-elle donc pas été claire dans son désir ? Très certainement. Elle commençait par faire Hanru, s’appliquant pour que le jeune homme soit fier d’elle.
Et à ses mots, l’enfant sauta de joie.
Un large sourire venait décorer ses traits alors qu’elle venait lui faire un câlin afin de le remercier.
Elle se représentait ensuite, en train de le remercier.
Dit-elle en passant son dessin au garçon.
No need to cry, I'll always be here
09.11.97
L’enfant était enthousiaste et dessinait avec tant d’application qu’elle en montrait toute sa volonté de bien faire. Lui aussi avait été comme elle et il avouait avec le recul qu’il l’était toujours pour vouloir honorer sa famille et rester l’un des membres respectables du clan. S’il ne doutait pas de sa position, parfois sa phobie lui rappelait qu’il n’était qu’un homme parmi tant d’autres et que personne n’était à l’abri de quelques défauts, ironiquement incompatibles avec ce qu’il aurait souhaité être. Peut-être aurait-il été différent s’il n’avait pas cette stupide phobie ? Il s’appréciait comme il était hormis ce détail et devait bien avouer se contenter d’être là à profiter comme la Chinoise dont le ruban attaché à ses cheveux lui allait si bien.
La simple évocation de le lui offrir avait suscité une réaction incroyable qu’il ne saisit pas immédiatement, refermant ses bras presque timidement dans le dos de la kitsune. « Je te le donne, mais celui-là est simple, bientôt tu en auras de plus jolis » surpris lui-même par l’idée qui l’avait effleuré, il se contenta de garder l’information pour orner le blanc de couleurs gracieuses. Il y voyait même des clochettes et du se mordre la joue pour ne pas exprimer à quel point il se sentait ridicule de vouloir la chérir. Il se concentra davantage sur le dessin et sur l’explication donnée par l’adolescent visiblement doué pour faire croire des choses aux plus jeunes. « D’accord, Miyuki a surement voulu te faire une farce » il attrape doucement la main de sa cadette et lui prend son crayon pour dessiner Miyuki et Jie Lian en écrivant leurs prénoms respectivement. « Ça c’est toi et Miyuki et ce qu’il t’a dit de dire c’est… » et il dessine un cœur et la coiffe traditionnelle japonaise de la femme sur elle. « Que tu veux te marier avec lui. Miyuki doit beaucoup t’aimer pour t’embêter comme ça, on ne va pas être copain s’il te fait dire des bêtises alors la prochaine fois que tu le vois, dis-lui ça »
Sans plus tarder, il lui dessine la signification de ce qu’il souhaite qu’elle comprenne. « S’il te dit encore des bêtises, Hanru gege ira le jeter au lac », et ce… dans le plus grand des calmes. Il n’hésita pas une seconde à tirer la langue tout en tirant le dessous de son œil droit.
Elle sourit plus grandement encore, touchant doucement le ruban que venait de lui offrir Hanru avant de s’exclamer :
Aux mots de son gege, elle fit une moue, curieuse des raisons qui auraient pu pousser Miyuki à se comporter de cette manière avec elle. Elle l’appréciait, mais elle n’allait pas se ‘marier’ avec lui, parce qu’elle n’avait pas encore l’âge de penser à ces choses-là, inconsciente de ce qu’impliquait la vie de sang-pur. Elle ricana pourtant aux mots d’Hanru, amusée qu’il soit si protecteur envers elle.
No need to cry, I'll always be here
09.11.97
Hanru ne savait pas dessiner et ça lui était égal, autant il ne comprenait rien à l’art, il savait apprécier certaines de ses formes, mais ne se cachait pas d’avoir aucun attrait particulier, ni curiosité en généralité. Il ne se voyait par conséquent pas juger une enfant sur des compétences qu’il ne possédait pas et la laissait s’appliquer sans la presser. Jie Lian était si calme à ses côtés qu’il la considérait précieuse en comparaison de sa propre famille et de ceux de son âge qu’il connaissait par conséquent. Le cadeau lui avait fait plaisir et malgré sa promesse resterait aux yeux de la Chinoise de valeur en comparaison de tous les trésors possibles. D’une certaine façon il pouvait comprendre. En exemple, il y avait des personnes qu’il affectionnait plus que d’autres et qui avaient à ses yeux plus d’importances à choisir s’il devait le faire un jour.
Sans aller plus en détail, il se contente de prendre le crayon à son tour et d’expliquer ce qu’il en était vraiment. Miyuki, ce prénom commençait déjà à échauffer son esprit pour de nombreuses raisons et il espérait que l’adolescent ne causerait pas de problème à l’enfant. Pour s’en assurer, il lui laissa entendre qu’elle devait prévenir l’autre kitsune qu’il interviendrait si jamais ça devait se reproduire. Le calme était revenu, dans son esprit aussi à la petite voix de Jie Lian, jusqu’à ce que sa question le concerne personnellement et l’interroge à son tour. « Un jour oui, mais pour l’instant je n’ai pas de fiancée » et c’était triste en un sens parce qu’il était déjà en onzième année. Son père ne l’avait pas oublié, il le savait bien, peut-être attendait-il quelqu’un en particulier pour lui spécifiquement, ce n’était pas lui qui le lui demanderait dans tous les cas. « Meimei, si un jour on te présente quelqu’un pour te dire que c’est ton fiancé tu le dis à Gege, s’il se comporte mal, tu le dis à Gege aussi » il se doutait bien que beaucoup auraient ce privilège avant lui de botter ardemment les fesses de l’avorton qui aura cette chance inouïe, mais en rajouter un peu plus ne ferait pas de mal… simple piqûre de rappel sur le nombre de personnes qui étaient là pour soutenir la demoiselle. Quelque part, il plaignait celui qui sera désigné comme tel.
L’enfant jouait de ses doigts sur son nouveau cadeau, observant d’un œil curieux le plus âgé. Elle ne comprenait pas très bien tout ce qu’impliquait un mariage, et s’il voulait tant savoir avec qui elle allait se marier, peut-être était-ce quelque chose de particulièrement important.
Jie Lian se demandait également avec qui Hanru pourrait se marier, s’il avait quelqu’un avec qui il voulait cela.
Et fière d’elle, elle posa ses points sur ses hanches..
No need to cry, I'll always be here
09.11.97
Il allait falloir qu’il attrape le Fujiwara aux cheveux ébène au détour d’un couloir pour lui intimer d’arrêter, mais il n’y avait eu aucun incident regrettable répercuté sur la demoiselle et peut-être que les sommations anticipées n’étaient pas la solution convenable pour résoudre ce problème. Généralement, on ne lui faisait pas répéter ses exigences et son regard noir pourtant dénué de toute haine était suffisant pour ne pas susciter cette envie. Concernant Miyuki cependant, il ne pouvait s’avancer, ayant le pressentiment que l’adolescent serait à même à lui prouver le contraire le plus stupidement possible, et ce dans l’unique but de le défier. Hanru n’avait aucune autorité sur lui tout comme sur n’importe qui en ces lieux, on le respectait et il en faisait de même. Le rapport de force qui existait entre lui et l’adolescent à problèmes n’était que dans la tête de ce dernier.
Sans trop insister, il se contenta de répondre aux questions posées par la plus jeune. Il était légitime qu’elle le lui demande étant donné les mots qu’on lui avait appris et quelque part, si l’Awataguchi avait pu maudire pour une courte période le renardeau trop espiègle il ne s’en serait pas privé, qu’importe les conséquences. Son châtiment aurait été à la hauteur de son crime, en soi rien qui ne fasse l’objet d’un renvoi, encore bien moins d’un conflit entre clans et ça l’arrangeait parce qu’il aurait regretté d’avoir pour ennemi l’enfant qu’il avait entre ses bras.
Elle lui confia vouloir se marier avec lui ce qui le fit rire assez franchement tant la surprise était grande. Ses longues mèches venaient border le visage de la Chinoise quand il penchait la tête. « Tu es un peu jeune pour moi Meimei. Mais je te protègerais même si tu n’es pas ma fiancée » et ainsi il lui promettait de ne jamais lui faire de mal sans que la petite ne le comprenne vraiment. Quant à sa façon de lui renvoyer ses gentillesses, Hanru ne pou qu’en sourire, fermant les yeux en posant sa tête sur le sommet de celle de la Fujiwara. « Personne ne fera du mal à Gege avec un tel avertissement » ou plutôt personne ne pourrait résister à cette enfant tant elle était l’innocence même. Il omettait volontairement que les relations entre époux n’étaient pas nécessairement bonnes. Ne sachant ce qu’il adviendrait de son mariage lorsqu’on lui annoncera un jour être fiancé, il préférait ne pas s’avancer. Ce qu’il avait en tête à ce moment, c’était plutôt l’idiot qui avait réussir à faire trembler les barrières derrière lesquelles il se tenait.
« Tu as fait tes devoirs ou tu veux les faire plus tard ? »
Elle n’était encore d’une enfant désireuse de rendre les siens fière d’elle, curieuse de tout et envieuse d’apprendre au mieux et le plus vite possible. Car la chinoise était un peu trop impatiente, heureuse de pouvoir offrir quelque chose à son père.
Une moue déçue se dessina sur les traits de la jeune Fujiwara alors qu’elle jouait avec ses doigts pour contenir sa gêne.
No need to cry, I'll always be here
09.11.97
Les craintes de l’enfant se ressentent dans une question aussi innocente qu’elle en était compliquée. Les enjeux dont il était question lors d’un mariage étaient nombreux et trop complexes pour être détaillés à la jeune Fujiwara, encore moins si cela devait impliquer de lui révéler les côtés sombres que chaque clan s’évertuait à garder secrets. Les apparences avaient une importance presque capitale et il y avait très peu de place pour les sentiments. Mais plutôt que de céder à la tentation de le lui dire, Hanru se contente de lui sourire « Gege t’aime très fort, mais comme une petite sœur. Tu n’as pas besoin d’être ma femme pour que je t’aime »
Lui-même ne savait ce qu’était réellement cette sensation dont il était question auprès de tant de personnes. Un flottement, une légèreté comme si le poids d’un corps s’’allégeait. Lui ne connaissait que l’affection qu’il portait à ses parents, son frère et ses amis. Notamment à la kitsune qu’il considérait davantage comme une Awataguchi qu’une Fujiwara. Mais il n’en dira rien, l’idée était trop étonnante, même pour lui-même pour savoir comment formuler ce qu’il ressentait pour la Chinoise. Cette volonté de la protéger en revanche, il savait d’où elle venait, lui-même était héritier, faisant de sa personne une menace et pour ne pas en avoir peur, se préparant à toute éventualité.
« Gege sera toujours là oui » il ne pouvait le promettre, mais essayer de respecter ses propres paroles au moins jusqu’à ce que leurs destins soient séparés ? C’était une possibilité effrayante, pourtant possible du fait étant qu’elle n’était pas de son clan. Même s’il avait bon espoir que les relations entretenues par les Awataguchi resteraient bonnes étant donné leur position actuelle. Il ne s’en inquiéta pas plus, poursuivant les questions pour se reconcentrer sur les devoirs de la demoiselle sur lesquels il avait droit de regard. Il l’aiderait si nécessaire.
Tout en sortant les cahiers et dans la fierté qui lui incombait de parler de sabre, Jie Lian réveillait l’anxiété des années à craindre qu’on ne lui permette plus de porter le nom Awataguchi tant il était important pour lui également de savoir manier le sabre. Le père de famille et professeur avait été choisi pour exercer selon des critères stricts et personne ne remettait en cause cette décision, il était indéniable que le niveau de cet homme dans cette matière précisément était surement monstrueux. « hm… pas aussi fort que ton père, mais je suis fort oui. Le sabre c’est important pour tout le monde » même s’il n’admettait pas avoir une peur bleue de blesser avec tant il exécrait la liqueur trop sombre qui se déposerait sur la lame. « Tu aimes ? Ça n’est pas trop difficile ? »
Elle levait vers l’Awataguchi son petit doigt, un regard féroce, déterminée à ce qu’il fasse une promesse avec elle.
No need to cry, I'll always be here
09.11.97
La subtilité d’un mariage n’était pas tant en ces accords entre clans, mais en cet amour qu’il ne connaissait pas et qui semblait davantage illusoire que réel. Du moins, selon l’avis général c’était l’amour qui était peint comme un tableau délicat fait de couleurs indéchiffrables. Pour les sangs purs, ce n’était que des accords et des histoires de lignées, en somme rien d’une affaire d’État, mais il y avait des aspects qu’il ne voulait aucunement envisager, moins encore quand il s’agissait de contraindre deux partis.
Dans les yeux de l’enfant, il semblait cependant important qu’elle y figure, même sans en être le protagoniste et il ne voyait aucune raison de refuser cette requête innocente. « Belle et gentille, oui elle le sera surement » en tout cas, il ne demandait rien de plus et n’était pas du genre difficile quand il s’agissait d’honorer son clan. Tout au contraire. Que pouvait-il ajouter de plus ? À ses yeux, la beauté représentait l’ordre et le respect, les manières et la neutralité, l’intelligence. Ses critères n’inspiraient en rien les tableaux, aucune description physique ne convenait face au canevas.
Une main se saisit de la sienne et il la laisse faire entre les cahiers, scellant une promesse qu’il devrait tenir ou briser plus tard, mais ne s’en inquiétera que lorsque le moment sera venu, s’il devait en être ainsi. Dans sa puérilité d’adolescent impulsif, il ne put s’empêcher un « Je ne suis pas un menteur » en chatouillant de sa main libre la plus jeune. Passionné d’épées, Jie loue les talents de son géniteur, indéniablement le meilleur puisque titulaire du poste d’enseignant. « Non, même si je voulais je ne pourrais pas » mais c’était une idée, progresser dans tous les cas faisait partie de ses objectifs, et ce pour lui comme pour son clan. Pour son père. Et à son évocation, il esquissa un sourire amusé, connaissant la réputation particulière que se faisait l’Awataguchi. « Oui c’est lui, mais tu n’as pas à avoir peur. Sauf si tu te fais punir, là je te plains, il est un peu rancunier avec les élèves » et il en savait quelque chose, ne serait-ce que pour sa ténacité à lui enseigner correctement toute chose. « Si tu es une bonne élève et que tu ne fais pas de bêtises, il ne t’embêtera pas » lui, en revanche, n’était pas à l’abri, même s’il ne le craignait pas, son respect restait tel qu’il espérait ne jamais se faire punir, par son père en tout cas.
Il était à présent temps de réviser ces exercices et la lecture se fit silencieusement avant de glisser quelques mots à l’enfant pour qu’elle se rende compte d’elle-même de ses erreurs. Ça n’était pas toujours facile, mais c’était satisfaisant pour Hanru qui avait retrouvé son calme, sans oublier pour autant qu’il devait parler à un autre Fujiwara pour éviter de voir Jie Lian perdre des points par la faute d’un autre.
|
|