Cela me fait bizarre que ce premier semestre soit déjà passé. Depuis que je suis arrivé à Mahou, j’ai l’impression que les jours sont moins longs, que mon impression d’attendre la mort est moins longue. Est-ce grâce aux personnes que je côtoie ici ? Collègue comme élève ? Très certainement !

Je ne peux mentir, j’ai l’impression d’avoir comme une bouffée d’air frais et c’est sûrement pour cela que je suis devenu bien plus volatile !

Les cours n’avaient pas encore commencé et petit à petit le personnel qui était parti revenait poser ses pieds sur l’île. Combien de nouvelles têtes allons-nous avoir en cette fin d’année ? Ne comptez pas échapper à mes taquineries bien longtemps !

Pour le moment, j’avais envie de marcher un petit peu et profiter du temps qui se faisait encore chaud et beau. Naturellement, mes pas m'emmènent vers le jardin japonais pour m’appuyer contre la rambarde du petit pont et pouvoir apercevoir les poissons nager.
J’avais même pris un peu de pain dans ma poche pour les nourrir alors que de mon côté, c’était une sucette qui m’occupait !

Plus pour longtemps.

Je ne compris pas tout de suite ce qui était en train de se passer et pourquoi le nom de ma mère me fut prononcé. De cette main sur mon épaule, je me suis retourné et ne put retenir une expression dès plus surprise sur mon visage.

Bien sûr que je me souvenais de toi, cette fois-ci douce sur la montagne… La seule fois où ce corps masculin était devenu féminin pour ne faire qu’un avec le tien.

Situation gênante, comment allais-je rattraper le coup?

« Je ne vous en faites pas, ne vous en faites pas ! Ce n’est pas moi qui vais mal le prendre. C’est tout de même étonnant de me confondre avec ma couleur de cheveux, non? » Ai-je plaisanté en penchant la tête.

Tu semblais bien t’en souvenir et même moi je sais que les blagues les plus courtes sont les meilleures, mais à ce stade…?

« Je suis fils unique ! Je n’ai donc pas de sœur. Je me demande bien qui je vous rappelle ! » D’accord, je ne savais pas vraiment comment gérer cette situation…

« Êtes-vous un nouveau venu dans le personnel ? Quel poste visez-vous ? On sera collègue ??? » Le naturel revenait finalement vite au galop.

« De mon côté, je m’appelle Akira et je suis l’un des cuisiniers. C’est grâce à moi que personne ne mourra de faim ! ♪ » Si tu étais bien un personnel, finalement… Tu allais bien pouvoir goûter à ma cuisine, ahaha…

Il est assez rare que je me sente mal à l’aise, mais je ne m’attendais vraiment pas à te revoir un jour et encore moins dans le même établissement où je travaillais. Devrais-je te dire qui je suis réellement ou alors changer de sujet et cacher ce secret au fond de moi ? Je n’avais jamais imaginé cette situation et me voilà bien coincé car oui, ma couleur de cheveux ne pouvait se confondre avec d’autres.

Je me rappelle bien ce doux moment passer ensemble, peut-être pas toutes nos conversations, mais ce thé et moment charnel n’avait été d’une douceur que ma mémoire n’avait oubliée. J’étais si peu expérimenté à ce moment-là… Je n’avais que dix neuf ou vingt après tout.

Je ne pensais même pas avoir la chance d’atteindre le quart de siècle…

J’avais parlé de cuisine par habitude ou alors par signe du passé. A quoi bon te le cacher ? Tu l’aurais su en me voyant bosser en cuisine et en suite à la table que nous allions partager avec le reste du personnel.

« Oui, c’est bien le cas ! Nous sommes deux à nous partager cette lourde tâche ! On fait de notre mieux pour que personne ne meurt de faim et que tout le monde soit satisfait ! On peut dire que nous sommes les héros de vos estomacs. ~ » Ai-je lâché d’un air un peu malicieux, mais en même temps comme si j’essayais de détendre l’atmosphère qui me semblait se tendre

Et finalement ta remarque…

Je ne pus retenir un léger rire sortir de ma bouche à cause de la surprise. -Je ne partais heureusement pas en fou rire cette fois-ci, saloperie de maladie.
Il est vrai qu’en Arya, nous avions parlé de mes doigts si doués en sucré et même si je m’y connaissais un peu en salé, depuis ses années j’étais devenu un pro ! Je n’avais pas été engagé dans cette école pour rien après tout.

« Bien sûr ! Voyons, si je ne savais faire que des desserts, je laisserai le plus gros à Aki’ ! Je ne vais pas me laisser dépasser aussi facilement. » Un petit air de défi et compétition.

Tu avais compris qui j’étais, n’est-ce pas ? L’intonation de ta voix et ses mots à double sens… était-ce un piège pour me faire avouer ou pas ?
Comme je le dis si bien, les blagues les plus courtes sont les meilleures.

Malheureusement, la notre avait une continuité que je n’avais pas prévu. -Ce n’était même pas vraiment une blague après tout-.
Alors, mettant les mains derrière mon dos, je me suis pensé un peu en avant, un sourire plus doux et moins taquin sur le visage.

« Au moins cette fois-ci, tu auras le temps de goûter à mes plats. » Ai-je simplement dit sans passer par un vouvoiement et te faisant ainsi comprendre mon identité.

Pas de sourire taquin, pas d’expression malicieuse.
Simplement un sourire comme à cette époque bien que mes traits étaient maintenant masculin.

« Effectivement ! Sauf si tu veux mourir de faim ou alors dépenser inutilement de l’argent alors que tu as tout gratuitement ici. ~ » Ai-je répondu de ma voix malicieuse par pure habitude d’embêter les personnes qui me tendaient des perches.

Néanmoins, je voyais petit à petit l’expression de ton visage changer et je me préparais déjà à recevoir un retour qui n’allait sûrement pas être très plaisant.
Vous saviez que j’étais sur le point de m’excuser ?

Si tu n’avais pas été aussi radical dans tes mots prouvant une fermeture d’esprit qui me rappelait cette famille qui me répugnait tant. Tu es un sang pur, n’est-ce pas Lyam ?

« Non ! Tu peux être heureux de savoir que tu es la seule personne avec qui j’ai passé ce doux petit moment. » J’avais sorti ma sucette de ma bouche pour la faire un peu tourner à côté de moi.
« Je ne pensais jamais te revoir et tu n’aurais jamais su que j’étais homme à la base. Je voulais simplement savoir ce que cela faisait d’être une femme jusqu’au bout. » Un sourire en coin.
«  Tu étais un peu maladroit, mais vraiment pas mauvais. Je peux te rassurer, j’en garde un bon souvenir. \(＾▽＾)/°»

Cette lueur de mépris dans tes yeux, cette colère que je pouvais ressentir en te regardant… Tu sais Lyam, ce sont des mots que mon connard de père m’a prononcé pour dire à quel point j’étais une gêne pour lui.

« Ce n’est pourtant pas ce que tu disais ce jour-là. ~ » J’ai soufflé alors que ma voix devenait plus malicieuse.

Qu’est-ce qui t’énerve réellement, Lyam ? Mon petit jeu ? Ce que je suis réellement ? Il est rare que des personnes s’énervent à ce point contre moi -je me demande toujours comment est-ce possible que je sois autant entouré-.

Tu me rends curieux…

Alors, je me suis un peu penché en avant, les mains derrière mon dos et ma sucette à nouveau dans ma bouche.

« Tu sais, si c’est ce changement de sexe qui te perturbe autant… Rien ne nous empêche de le faire alors que je suis un homme. » Était-ce osé comme propositions ? Totalement.

J’avais envie de voir ta réaction, ce que tu allais me dire… A quel point ton esprit était fermé et ta manière d’agir.

Dépendant ton comportement, quelque chose me disait qu’on allait bien pouvoir s’amuser toi et moi.  

Mes yeux plongés dans les tiens, je ne les détournai pas une seule seconde pour scruter la moindre de tes émotions, de tes réactions. J’avais envie de savoir comment tu penses, comment tu avais pris la nouvelle et à quel point tu pouvais m’en vouloir. Ma curiosité n’était pas saine, je le sais et quelque part je m’en fiche complètement.

Et les mots s’en suivirent, moi qui étais maintenant accolé à cette rambarde qui ne me laissait moyen de m’échapper – je n’en avais toute façon pas envie-. Ma réaction ? Ce sourire taquin et amusé ne quittait pas mon visage.
Ce genre de colère, de menace… Cela me permettait de me sentir vivant, alors je n’avais pas l’intention de m’arrêter. Continue, Lyam !

A l’époque j’avais pensé que tu étais quelqu’un de doux et ouvert d’esprits… Finalement, tu es au même stade que ces autres sang-pur qui jugent ne serait-ce qu’une faute ou un changement.
Es-tu comme mon père à vouloir me rejeter ? Que je te répugne ?

Désolé pour toi, Lyam. Mais je ne cherche aucune reconnaissance, aucun lendemain à mes nuits. Je ressens pour oublier la douleur qui m’habite et je crois que tu vas bien m’y aider.

Quand tu eues fini de m’insulter, ce fut plus fort que moi. J’ai lâché un grand fou rire à m’en entourer le ventre de mes bras.

Tu ne me faisais peur, au contraire : Ça faisait monter cette adrénaline en moi.

« Ah, Lyam ! Tu es si drôle ! Je ne te pensais pas aussi fermé d’esprit et plus intelligent que ça. A croire qu’il ne faut vraiment pas se fier aux premières apparences, n’est-ce pas ? » Ai-je sous entendu pour en rajouter une couche.

« Tu peux me traiter de tous les noms que tu veux, ils ne m’atteindront pas ! » j’y ai été habitué.
« Mais sache qu’il existe des gens qui peuvent autant aimer femme qu’homme. C’est triste de me catégoriser aussi rapidement, je devrais en être blessé ! » J’avais pris une mine faussement boudeuse.
« Mais ne t’en fais pas, je ne suis pas du genre à crier sur tous les toits avec qui j’ai couché ! Sauf si tu me cherches un peu trop.~ » Une simple phrase taquine, ce n’était vraiment pas mon genre.

« Mais sache que cet air en colère te va vraiment très bien. Encore plus de me retrouver ainsi coincer entre cette rambarde et toi. C’en est presque excitant. » Soufflais-je un coup toujours pour pousser le bouchon un peu plus loin.

« Que vas-tu faire maintenant que nous sommes obligés de cohabiter ? Tu ne pourras m’éviter. On sera à la même table après tout ! Je pourrais même venir manger à côté de toi.~ » Mon air malicieux revenu sur le visage.

Le jeu va finalement vraiment commencer maintenant, Lyam.

Lyam… Sais-tu que tu es quelqu’un de drôlement intéressant ? Voir ainsi tes expressions et tes réponses à ces affirmations que je te donnais ne pouvais que me faire sourire de plus en plus. Crois-tu que cela serait aussi simple de se débrasser de moi ?
Alors que tu continuais de parler, je balançais un peu ma tête sur les côtés comme si je buvais tes paroles tel un enfant sage à qui l’on disait les règles d’un établissement scolaire. Sauf que moi, j’étais un adulte tout comme toi…

«  Bien sûr ! Cela pourrait se passer comme ça ! Mais ne trouves-tu pas cela ennuyant ? Je préfère m’amuser ! Alors… » Un sourire en coin.

« Je viendrais réserver en avance ma place à côté de toi ! Peut-être même que nous aurons la chaaance d’avoir des rondes ensemble ! Je me demande si ma chambre est loin de la tienne, mh… A vérifier ! Et bien sûr que je viendrais discuter avec toi quand je te croiserai dans les couloirs. Même par origami, promis ! » Chaque petit mot était là pour te perturber et tester tes limites, Lyam.

« Je suis sûr que tout va trèèès bien se passer ! » J’avais à nouveau fait tourner ma sucette dans ma main, un léger rire et un sourire amusé sur le visage.

Par contre, toi qui avais précédemment reculé, je ne m’attendais pas à te voir t’approcher à nouveau et attraper mon menton entre tes doigts. Je ne pouvais détourner mon regard du tiens. Comme à l’époque, je te trouvais vraiment ravissant et charmeur : Ça n’avait pas changé.

« Tes yeux sont toujours aussi beaux vu d’aussi près…. Et oui, je trouve cette situation excitante… »

J’aimais me sentir ainsi en danger, ne plus pouvoir bouger. Appuyer contre la rambarde et ta main qui montrait que je pouvais à nouveau être tient pendant un moment. Sauf que la situation ne fut pas la même cette fois-ci.

Sentant ta main me repousser en arrière, il était évident que je n’allais pas tenir. Cherchais-tu à me tuer ? Me faire mal ? Je ne demande que ça…
Mais je ne tomberai pas seul !

Alors que mon corps se trouvait projeté en arrière, ma main s’agrippa à ta chemise et t’entraina avec moi dans ma chute avant que je ne tombe dans cette petite étendue d’eau.
Je ne pus retenir une grimace de douleur à sentir le choc de l’impact dans mon dos et reprendre un coup mon souffle.

T’ayant entrainé, te voilà maintenant au-dessus de moi et ton poids n’avait certainement pas aidé la douleur de mon dos…

« Neeeh Lyaaaaam ! Ce n’est pas très gentil ça ! Imagine que je me serais cassé la nuque, je serais mort ! Mais je vois que je suis un bon coussin, non ? J’ai amorti ta chute. Tu m’en dois une ! » Ai-je fait d’une mine boudeuse et ne pouvant pas bouger.

« Puis maintenant, on est complètement trempé ! J’espère que nous n’avons pas tué une carpe en tombant… Je sais que tu es l’ami des animaux, mais quand même. Vouloir les voir d’aussi près, il y a d’autres moyens ! Les pauvres ! »

Est-ce que j’ai besoin de préciser que la position dans laquelle nous sommes est plutôt tendancieuse et ne me déplait guère ? Je vais finir par croire que tu le fais exprès !

Je ne m’attendais pas à passer une telle journée et m’amuser autant ! Je sens que cette rentrée scolaire allait être mouvementée et bien plus que prévue. Toujours en dessous de toi, mes yeux n’avaient pas quitté les tiens une seule seconde jusqu’à que tu t’en ailles me laissant avoir un ricanement que je ne retins même pas.

« C’est toi qui l’as cherché ! Si tu ne m’avais pas poussé, nous ne serions pas tombés. ~ » Ai-je presque chantonné alors que je commençais doucement à me relever pour ne pas encore plus déranger ces pauvres carpes effrayées.

Heureusement qu’il ne faisait pas encore trop froid car avec ma santé, je n’aurai pas envie de commencer l’année avec un rhume incontrôlé. J’ai à mon tour sorti ma baguette pour commencer à sécher mes vêtements, mais je laissais mes cheveux se sécher seul : c’était mieux pour eux !

« Tu es plutôt sexy avec cette eau qui coulait de tes cheveux.~ » Encore cette voix taquine que je ne pouvais revenir avant d’entendre ce que tu venais de me dire.

Oh que tu allais être amusant Lyam… Sais-tu les perches que tu étais en train de me tendre ? Mettant une de mes mains sur ma joue, je fis semblant de prendre un air gêné.

« Promis, je ferais attention Lyam-chan ! C’est très gentil à toi de me mettre en garde, j’apprécie le geste… » Ma voix était devenue plus douce et gênée… Peut-être te rappelant celle de l’époque, mais en légèrement plus masculine.

Tournant un coup les yeux vers les carpes, je me suis aussi mis en direction de la sortie pour ne pas continuer à les effrayer et je fus quelque surpris par tes paroles.

« Mais… Ce n’était pas très gentil de les effrayer de la sorte ! Je pensais que tu étais plus doux avec les animaux… » Cette fois-ci ma voix était devenue plus déçue.

Ahaha… Tu sais, je les connais ces mots, Lyam. Je les connais très bien et tu descends de plus en plus dans mon estime. Je vais prendre un malin plaisir à ne pas sortir de ta vie avant que je ne m’envole définitivement.

Tu me détestes et tes mots me rappelle ce père que je hais tant. Des points qui ne devraient exister chez personnes pour que le monde puisse devenir meilleur. C’est à cause de gens comme toi que des familles sont détruites et des vies gâchées.
Cette fois-ci, j’ai ma part de responsabilité, je le conçois. Je ne suis pas bête et je ne me voile pas la face. Mais il y avait des limites.

« En tout cas, j’ai hâte d’apprendre à réellement te connaitre Lyam ! Tout comme tu apprendras qui je suis. On va bien s’amuser. ♪ » Ai-je dis en m'approchant de toi et essayant de te sauter dessus pour t'enlacer de mes bras.

Pour ce que je te laisserai lire en moi, bien évidemment.

Je me doutais que notre conversation n’allait durer très longtemps, mais j’étais comme satisfait d’avoir pu creuser un peu ta personnalité, Lyam.
Ce petit sourire ne quittait pas mon visage, les mains toujours derrière mon dos en train de jouer entre elles.
J’avais quitté l’étang depuis un moment, préférant la terre ferme que mes chaussures qui étaient déjà trempées.

« J’y compte bien ! A très bientôt, Lyam ! » J’avais fait exprès de bien appuyer sur le mot -très- pour quelque part te rappeler que j’allais toujours être là.

T’ayant finalement lâché, je te fis un signe de la main pour te dire au revoir sans que mon doux sourire ne disparaisse.

Ce ne fut qu’une fois ta silhouette disparue que mon air devint plus sombre… Brisant le bâtonnet qu’il me restait de ma sucette en deux laissant un « tch » sortir de ma bouche.

« Moi aussi, je ne dois pas me fier aux premières apparences, hein ? » Avais-je lâché à moi-même alors que mes yeux s’étaient posés sur l’étang à carpe.

Une avait bien succombé à notre chute et mon visage se fit légèrement peiné.

« Les sang-purs qui cherchent toujours à écraser les plus faibles même s’il doit y avoir des dommages collatéraux. » Ma main s’était penchée vers ce petit cadavre voltant, un soupirant sortant.

« Désolé petite carpe, tu serviras de repas à tes consœurs. » mon dos se tourna pour retourner à mon logement car moi aussi j’avais besoin de me changer, je n’allais pas rester aussi crasseux.

Arrivant à mon logement, j’eu un sourire en coin car mes yeux se posèrent sur le nom de mon voisin.

«  C’est trop bien ! Nous sommes même voisin !! » Ai-je élevé la voix pour que tu m’entendes avant de fermer la porte derrière moi.

Le jeu ne faisait que commencer, Lyam.