— MAHOUTOKORO
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tant qu'il y aura des hommes, takumi
Saburoo Ueda
oui
Citation : How call someone with no body and no nose? Nobody knows.
Age : 46 (05/06)
Rang : S1
Orochi
Orochi
Saburoo Ueda
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Saburoo Ueda

tant qu'il y aura des hommes Au centre de la pièce voûté sur la table basse, afféré à couper des ingrédients se tiennent Saburoo et son tourment.
Le thé infuse, le monde attend.



Nul chagrin n’est plus lourd que la perte d’un enfant —si ce n’est l’abjecte horreur de celle de nombreux autres.

J’ai connu l’horreur, ou du moins je le pensais : je pensais la connaître comme l’on connait une vieille amante, celle dont on a goûté les lèvres une fois et qui dès lors se pâme au coin de l’œil, jamais loin mais jamais proche non plus ; je pensais la connaître alors que je songeais jadis à quelques alcaloïdes nouveaux alliant stupéfiante douceur et indéniable dépendance, seulement avec la saveur lénifiante sinon empirique d’être l’acteur de malheurs futurs ; je pensais la connaître de la même manière que l’on sait la force exacte de la main parentale balancée sous la fureur, le parfait poids de l’intensité de regards manquants à mon âme mais dispensés, que dis-je, gaspillés, à d’autres.  
Mais l’horreur qui s’est présentée à mes yeux n’avait rien de tel et l’évidence martèle encore ma conscience : je n’avais ainsi perçu que quelques esquisses d’horreur, et ce au travers de la teinture opaque d’un verre obscurci par le désintérêt.
Car il y a des horreurs douces qui se traînent elles-mêmes dans la longueur, qui perdent tranquillement leur danger par des jours qui se font latents.
Et il y a des horreurs violentes qui, sous un seul de leur éclat, enterrent des dizaines d’enfants.  

Ces jours s’étaient tassés sur eux-mêmes, avaient macéré sous une lourdeur isobare : celle de la pression constante et maussade d’avenirs peu glorieux. Le temps quant à lui s’était étiré au-delà même de sa demi-vie dans une étrange cinétique mue par un commun leitmotiv : des mots, des mots, des mots et encore des mots. Beaucoup de mots ont été déversés par des bouches avisées et par d’autres qui l’étaient moins ; des mots pour les présents, pour les absents, pour les gisants et quelques mots encore pour les mourants.

Disperser ces supplices au loin ! L’heure venue moult problèmes fleurissent de leurs germes telluriques pour en crever l’écorce du monde, alors je préfère m’en distraire en attendant l’instant fatidique où ils fracasseront mon oreille et accapareront mon talent. Et quel talent ! Je le dispense d’une main experte et l’affûte à la coupe de fleurs d’aconit sous le ventre aigu de couteaux finement ciselés. La potion est un Art dont la grandeur existe même dans le plus infime des actes ; et s’il se trouve qu’il m’en conforte l’esprit, alors grand bien s’en fasse.

Ah te voilà ! Il n’y a de plus grand soulagement que le visage connu d’un être de confiance, sublimé par l’attrait opiniâtre d’œillades dont l’expressivité ne se dévoilait à la cornée humaine par une minutieuse recherche, ou à défaut par l’expérience d’une amitié forte d’années passées. Tiens, le gyokuro doit être suffisamment infusé—du moins je crois. Celui qui s’accroche au détail à l’instar d’un naufragé qui s’accroche à une barque pourrait prétendre s’appesantir sur la chose, car le thé aurait pu —si ce n’est du— être versé de longues minutes plus tôt : mais cela est pour le potionniste que j’incarne un drame personnel inavouable qui demeurera fermement inavoué.
Mais sers-toi donc ! Il devrait y en avoir assez pour nous deux dans la théière—la bleue. Non, pas celle-ci, la théière céruléenne. La bleue persane me sert à brasser les philtres de confusion. Ah ! Et ne soulève pas le couvercle de la bleue sarcelle, j’y décante depuis des jours un substrat sulfurique et je préférerais ne pas avoir à recommencer l’expérience. Je ne tiens pas non plus à devoir évacuer la pièce sous l’odeur. Tout n’était qu’affaire d’organisation.

Installe-toi Takumi, et dis-moi, comment vas-tu ? Et ton fils ? Ponctué d’un sempiternel sourire, car si d’un substitut d’un à un véritable père telle est l'incontestable mesure du gouffre, la présence de Takumi est un baume aux maux de l’âme.
Takumi Awataguchi
*hurle*
Citation : Ok.
Age : 46 ans
Rang : S0
Orochi
Orochi
Takumi Awataguchi
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Takumi Awataguchi
tant qu'il y aura des hommes Nul n’est plus effrayant de la mort de son enfant, quand bien même ce soit la perte d’une centaine d’autres. Peut-être est-ce le sentiment que tous parents possèdent, peut-être suis-je le seul, ça n’a que peu d’importance.

Quelques échos avaient murmuré à mon oreille, Ô combien il avait souffert, tremblant le soir dans son lit, ce fils que je veux tant protéger, avait sombré dans une peur qu’il ne pouvait taire. Les larmes qu’il voulait silencieuses plantaient en mon cœur des flèches empoisonnées. Nul n’est plus terrible que de pouvoir calmer les maux de son enfant, de se retrouver impuissant, un goût amer caressant sa gorge face à l’impossibilité d’apaiser les cauchemars qui l’enlacent. S’entremêlent des mots que je peine à comprendre, des souvenirs qu’il n’arrive pas à me conter, et je ne peux que lui promettre d’être là.
Je ne peux qu’écouter les récits.
Car cet enfer je ne l’ai pas vécu.
Je l’ai entendu, suspecté, recherché. Des flammes dans leurs âmes, elles brûlent tout sur leur passage, et ma seule réponse se trouve dans la gorge d’autrui. Quelques bribes me parviennent parfois, dans les dires de ceux qui ont vu, de ceux dont la peau s’écorche encore sous le feu qui les consume.

J’ai lu sur leurs visages qu’ils avaient connu l’horreur, j’ai vu dans leurs regards qu’ils avaient vécu l’enfer, qu’il avait brûlé leur cœur – et pour d’autres, leur corps. Les traits tirés, le visage plus sévère qu’il ne l’aurait dû, il y avait en eux des sentiments que je ne peux comprendre.
Et tu seras mes yeux.
Quelques origamis dans ma poigne, j’avance d’un pas rapide vers ta chambre. Vers toi.

D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours éprouvé une profonde fascination envers toi, peut-être dû à la légèreté qui se dégage de ta personne. T’écouter à quelque chose d’apaisant, bien qu’en réalité tu sembles plus déblatérer des informations dont je ne me soucie guère, j’en apprécie les tonalités. Un regard sur les théières dont tu parles avec tant d’ambition, je m’installe en tailleur sous le kotatsu, ne pipant mot à ton discours – et n’aillant pas l’intention de te couper dans ton élan.
Parfois je me demande,
Comment fais-tu pour être si loquace ?

Tout cela m’arrache un sourire, d’une main j’attrape la théière céruléenne qui – devrait – contenir le gyokuro. D’un geste, j’en sers deux tasses, déposant la tienne face à moi dans un message silencieux.
Viens, assieds-toi mon ami.

Haku fait toujours des cauchemars, je ne sais comment calmer ses peurs, dis-moi Saburoo, je n’ai que des échos, raconte-moi ce qu’il s’est passé. Dis-moi tout, chaque détail, je veux savoir. Le thé brûle mes lèvres comme les mots brûlent ma gorge. J’espère que tu vas mieux, ainsi que tes neuveux. Ou devrais-je dire tes enfants.


Saburoo Ueda
oui
Citation : How call someone with no body and no nose? Nobody knows.
Age : 46 (05/06)
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Orochi
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Saburoo Ueda
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Saburoo Ueda

tant qu'il y aura des hommes Distillé entre chaque fibre de nos êtres plane entière une quiétude immarcescible, douce et forte d’années qui n’ont de cesse de s’écouler à leur rythme tranquille, et sous le couvert mutin de nos sourires —car si les siens sont durs à percer, ils naissent simples sinon secrets au creux d’accalmies familières— j’en délaisse la coupe des sépales d’aconit au gré d’autres veilles solitaires. A sa muette exhortation je ne peux que m’échoir à son front, alanguis par la tendre habitude d’une vie bercée par le dictame de sa voix au timbre profond qui a mon insouciance se révèle porteuse de sombres doléances.

Ah mon cher Takumi, toujours aussi précis et sans détours que la lame d’un couteau, comme à ton habitude, évidemment. Ce besoin viscéral, érigé sous sa langue en lance, en tirait de mon flanc quelques douleurs fantômes encore thésaurisées au chevet de nuits veillées. Les événements ont été durs pour tous, et particulièrement pour les jeunes âmes. Elles ont lutté, luttent et lutteront encore pour les années à venir. Les dieux en soient loués et n’en déplaise à certains, le petit Tsubaki a survécu, mais cela s’est joué à peu. Le spasme désespéré de tels souvenirs m’en fait saisir la tasse au renfort bien inutile de mes deux mains —qu’elle soit égide délabrée ou radeau démantelé, encore est-il que mes frères jugeraient cette faiblesse au haut de leurs œillades d’aigles fiers. Je n’oserai de telles déconvenues à leur face, mais sous la vigilance de Takumi, c’est un autre refrain qui se joue.
Je ne saurais te dire quels mots choisir pour calmer les peurs d’Haku quand je peine déjà à trouver ceux pour apaiser celles de mes neveux. On aura beau dire, mon talent ne réside pas dans ma parole, ah ! Eut-il été bénédiction pour ma propre âme, être doté du don des mots ; eut-il été salutaire pour grappiller l’attention de Père à défaut de ne récolter que les miettes de son désintérêt. Mais ah, à d’autres maux en d’autres cieux. Pour autant, je peux te donner ce que mes mains font de mieux et brasser pour ton fils une potion de sommeil sans rêve. Je m’empresse de lever la main dans un geste qui se veut apaisant, abandonnant momentanément de ma peau la chaleur du thé conduite par la fonte : Pas de drogue dans celle-ci mon ami, seule la certitude de nuits dénuées de songes, qu’ils soient bons ou mauvais. Loin de remèdes allopathiques s’il en est, le bonheur flottant dispensé par quelques artifices n’a d’égal celui du véritable repos. Tu n’as pas à me répondre tout de suite mon ami, la proposition est ouverte et le demeura à ton bon vouloir.

Sommes-nous tous deux conscients du fait que l’essence même du problème en son cœur nauséabond n’est pas abordé : non, il frémit misérablement sur le kotatsu, tabou sur l’autel entre nos deux tasses, nos deux corps. Je le vois dénudé de ses entrailles, pompant vide de sang mais avide d’air, ses ventricules ouvertes au monde et d’une vérité immonde que je n’ose aborder de vive voix. Quel comble, que de nous deux se soit moi qui ne parvienne à entamer le substrat de la discussion.
Tant de malheurs qui jaillissent de terre mus d’une désagréable spéciation malvenue aux portes de nos foyers : je m’y essaie eu égard à son amitié, le flamboyant du regard fixe dans le sien.

Ah, Takumi, toi et tes yokais auraient été plus que bienvenus ce jour-là. Cela n’est peu dire. Force est d’admettre que le combat n’est guère mon domaine de prédilection, et que les potions n’offrent en ces heures que peu d’utilité—mis à part la potion de soin occasionnelle. Et encore ! Faut-il qu’elle ait été brassée auparavant. L’aveu en est un crève-cœur connu, pourtant sa douleur est tout aussi vive qu’à la première pensée.
Il faut dire que je n’ai que trop pris la poussière, enfermé derrière des formules abstraites et la fumée de divers brassages pendant tant d’années que j’en ai perdu le nombre. Sais-tu que depuis ce jour j’ai une quantité indécente de potions de soin sagement rangées dans la plupart des placards ? J’ai également pris d’assaut l’infirmerie pour y refaire plus de stocks qu’ils n’en ont de place !
Si bien que j’en deviens plaintif, soufflant d’une fausse miséricorde ces mots comme on en murmurerait un inavouable secret : Je crois bien que j'y aie une réputation désormais.
Takumi Awataguchi
*hurle*
Citation : Ok.
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Orochi
Orochi
Takumi Awataguchi
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Takumi Awataguchi
tant qu'il y aura des hommes Les pleurs de son fils le réveillaient parfois la nuit, le corps tremblotant des souvenirs qui le rongeaient, Takumi ne savait guère comment gérer cette situation. Il n’était pas de ceux dont les mots apaisaient le cœur, au contraire, il n’offrait que rarement des paroles réconfortantes – et ce, même à la chair de son sang. Nulle expression sur son faciès aux sentences de son ami, pourtant il ressent en son cœur une pointe d’amusement : il avait toujours été direct, qu’importe les circonstances. En père inquiet, il s’était empressé de demander conseil à Saburoo, conscient qu’il ne serait peut-être pas le mieux placé pour ce faire, il n’y avait qu’en lui qu’il éprouvait assez de confiance pour lui confier les doutes qui l’assaillaient.

Calmer ses peurs, voilà des intentions louables, certainement que son propre père se serait moqué de son incompétence à faire taire les larmes de l’enfant. Seulement, Shisui n’avait pas eu une descendance si pure, son frère et lui rapidement adaptés à la vie qui les attendaient, aux devoirs de leur sang.

En réalité, l’enseignant se fichait de la méthode, Haku devait s’endurcir pour le futur qui l’attendait – son nom et son rang ne lui permettrait guère de fuir ses devoirs. Apaiser son cœur était une chose, le faire grandir en était une autre, et Takumi savait pertinemment qu’il allait devoir le secouer un peu s’il ne voulait pas que son fils s’effondre. Des songes sans rêve me permettraient seulement de dormir en paix. L’onmyoji n’était pas contre, mais cela n’arrangerait que le problème de ses nuits.

S’il était venu vers Saburoo, ce n’était pas seulement pour lui quémander quelques potions ou drogues afin de calmer Haku : mais parce que l’homme savait. Ils étaient amis, et plus encore : complice. Père n’en peut plus, il apprécie énormément son petit-fils, mais le voir se voiler la face l’agace particulièrement. Un soupir, las. Moi aussi. Il se devait de l’éduquer, mais le petit faisait un blocage et semblait si innocent que personne ne devait se douter des enseignements qu’il recevait une fois chez lui.

Ne crois-tu pas qu’il serait temps de le secouer un peu ? Il a dix ans et se comporte encore comme un enfant. Chose normale pour nombre de gens, seulement Haku n’était pas né au bon endroit, il ne devrait nullement craindre le sang, ni même la mort. Il ne devrait avoir peur de ce genre de choses. Car la peur rongerait son cœur, jusqu’à lui arracher la vie. Il levait simplement les yeux vers les cieux, une gorgée encore brûlante pour calmer l’énervement qui caressait son cœur.

Sérieux, il écoutait le récit de son vieil ami. Takumi n’était pas présent lors du retour de Seimei, il n’avait fait qu’entendre quelques histoires, sans avoir plus de détails. Non pas qu’il désirait entendre toutes les atrocités que les enfants avaient subit ce jour là – à vrai dire, il s’en fichait un peu – mais il restait intéressé par le retour d’un pareil homme ainsi que pour la santé de ceux qu’il connaissait un minimum. La mort n’avait rien de fatal, elle signifiait seulement un retour à zéro, alors il espérait pour certains qu’il trouverait un avenir meilleur dans leur future vie.


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