Sans même prendre le temps d'analyser la situation, Hotaru avait filé hors de la pièce à la recherche d'élèves encore présents dans le bâtiment, mais une trentaine de secondes lui avait suffit à rendre compte de la vacuité totale des lieux.

L'école avait peut-être été touchée, mais seul le bâtiment en subirait les frais - ce qui n'était pas sans rassurer le blondinet. Il revint au trot jusqu'à Asagao, juste à temps pour entendre la demande d'une jeune fille troublée.

Va-t'en, songea-t-il un instant. Va retrouver ton frère.

Hotaru ne pouvait penser à autre chose. Il avait beau avoir été rassuré, maintenant qu'il avait retrouvé ses esprits, il ne parvenait pas à s'ôter cette pensée de la tête. Tsubaki... il était entre de bonnes mains, mais il voulait le voir. Il devait le voir - sans quoi, il continuerait d'angoisser tout au long de la journée.

Était-ce pour soulager sa conscience ?
Il se sentait mal pour celles qu'ils étaient venus était, mais...

Il n'y a pas que toi qui compte.

Cette pensée transperça cette bulle d'égoïsme aussi soudainement que son choc émotionnel précédent. C'est quelque chose qu'on lui disait souvent, pour lui qui ne s'appuyait souvent que sur son propre ressenti jusqu'à en oublier l'essentiel.

C'est vrai - Hotaru n'avait jamais été ce genre de personnes. Il pensait toujours aux autres, quelle que soit la situation, et cet altruisme lui permettait de s'évader de ses angoisses. Là encore, s'il pouvait ne pas penser à son frère, il acceptait avec joie de dédier son temps à ces demoiselles.

Bien sûr, répondit-il avec un sourire rassurant. Je-

Le tremblement le surprit tant qu'il manqua d'en perdre l'équilibre, malgré la faiblesse de la secousse. Était-ce l'apocalypse ? Ce qu'il ne pouvait nier, c'est que son frère était à l'origine de l'incendie de l'école - son sort avait été détourné à ces horribles fins. Et maintenant, le volcan ?

Seimei prévoyait-il de détruire l'entièreté de Mahoutokoro, au-delà de cette nouvelle génération hybride ? Ses idées étaient mortes avec lui, il y a de ça un millénaire. Et la nostalgie ne suffirait pas à les raviver, tant qu'il y aurait des gens prêts à se battre contre elles. Avec délicatesse, il s'accroupit et tendit la main à Kohana.

Tout va bien, tu peux sortir. Veux-tu chercher Moshi avec moi ?

Fujiwara ? Ils... ?

Hotaru écarquille les yeux, la révélation le surprend. Momo semble perturbée, ses mots hésitants, le regard vacille avant de se replonger dans les atrocités du passé. Alors qu'il hésite entre le fait de rassurer Kohana et la nécessité de rassembler des informations, la pensée de Tsubaki lui revient.

Un pincement au cœur, le blondinet se redresse et accélère sa lecture des courriers, cherchant à éluder les banalités pour trouver un indice plus pertinent. Il cherche n'importe quoi : un format différent, une écriture, une enveloppe qui change.

Au fond, l'essentiel est-il vraiment à vue d'œil, ici, à portée de baguettes, consultable par n'importe quel élève qui passerait ? Le bureau est peut-être protégé, mais si le directeur venait à sortir, n'importe qui serait à même de découvrir l'existence d'un plan d'une si gigantesque envergure. Et si, au fond, les océans s'étaient déchaînés sur leur demande ? S'ils avaient cherché à isoler ce monde pour mieux en conserver le contrôle ?

Vous ne nous laisserez pas tomber, professeur, n'est-ce pas ?

Il s'inclut égoïstement dans le lot, alors qu'il sait pertinemment que lui ne sortira jamais indemne de ces événements. Quelque part, il en est déjà brisé. Avec la mort... avec la blessure de son frère, c'est ainsi qu'il veut y penser, avec cette blessure, il a senti une part de lui disparaitre à tout jamais, engloutie par une culpabilité trop grande pour que le temps ne suffise à l'éluder, si longuement qu'il puisse vivre. Au fond, il n'attend pas d'être protégé, ni même d'en sortir vivant.

D'un revers de main, il efface les perles brillantes de ses yeux et cherche un secret quelconque : un tiroir caché, une trappe, un dossier quelconque qui aurait échappé à leur vigilance. La réponse est là, quelque part, il ne tient qu'à eux de la trouver. L'essentiel est invisible pour les yeux.