Instant crush // Ange
Yume Ueda
Citation : But It's Better If You Do
Age : 18 (8/11/79)
Ryujin
Yume Ueda
A little time with you is all that i get
That’s all we need because its all we can take
One thing I never see the same when you'r 'round— Instant Crush // Daft Punk
Now I thought about what I wanna say
But I never really know where to go
J’ai embrassé ma mère, j’ai serré mon père dans mes bras, j’ai vu tous mes frères. J’ai emmené Thor au bord de l’eau et j’ai passé la soirée à le caresser ; j’ai observé l’océan en imaginant que, quelques jours auparavant, j’étais sous sa surface. Hadès me manque : je ne sais pas s’il est resté sur l’île ou si quelqu’un l’a récupéré, mais je ne l’ai pas trouvé. Tout le monde me manque, même ceux que je vois tous les jours. Alors, j’ai demandé à Masa si je pouvais aller chez lui et j’ai demandé à Uehara, aussi, si je pouvais venir voir Kiyoshi.
Et j’ai voulu voir Ange, dès le lendemain – ou le surlendemain – de notre retour, alors même que j’ai prévu de passer mes dernières semaines chez lui.
J’ai laissé un mot sur la table, pour prévenir que je m’absentais pour la journée et j’ai pris les transports moldus jusqu’au plus près du domaine. J’ai fini ma route en marchant et je me suis engouffré dans le domaine, allant retrouver Ange, sans perdre de temps – je saluerai Saburoo plus tard ; il ne m’en voudra pas, je pense qu’il est habitué à nos frasques, depuis le temps.
Dès que mes pas me mènent à lui, j’attrape mon cousin entre mes bras.
« Comment tu vas ? »
Je souffle, mon visage trouvant sa place au creux de son cou. Mais je m’écarte, bien vite, l’air un peu trop sérieux – ou torturé, attristé ; une douleur qui ne disparait pas.
« On va devoir parler, tu sais… de ce qu’il s’est passé. Et de la drogue, Ange. Sérieusement. »
Et j’en ai pas plus envie de lui. J’aimerais autant passer à autre et ne plus y penser. Mais je crois que j’ai déjà trop souvent fermé les yeux et je crois qu’on s’est trop souvent caché des trucs et je crois qu’il faut qu’on soit honnête, pour se retrouver.
Ange Ueda
Citation : risus abundat in ore stultorum -- à la bouche du sot, le rire abonde
Age : 17 (29/02)
Rang : 60/100 dsl
Amaterasu
Ange Ueda
Ô mes cousins, c’est un bien triste traître que vous avez recueilli—il est là, tapi dans mon ombre et enfoui dans mes os. Sans ma couardise mes mains seraient propres, mes cheveux rouges et mon visage intouché ; je conserve cette plaie en consécration de mes erreurs, et y enfouis parfois l’index pour en raviver la douleur.
Ce que je vois dans le miroir ne me ressemble pas—pâle copie d’un héros que j’ai trompé, j’ai osé plonger dans ses yeux vides mes espoirs infantiles. Ce qui me fait face dans cette glace que je brise est un mensonge que moi-même je cultive, en sourires maladroits et en boulettes craquées sous ma dent. Je leur fais face en victime, mais je me sais bourreau ; sans doute mes chimères sont-elles translucides, car sur mon bureau gît l’origami anthracite du haut traître.
Ah, on n’offre guère de répit aux malfaiteurs—je le mérite.
Alors quand tes bras m’entourent et que ta chaleur me ceinture, quand je sais que de tendres moments m’attendent et qu’il n’y a que ton nez dans mon cou pour me rappeler que je respire, je me risque à la foi et m’apprête à confesser l’entièreté atroce de mes péchés. Sans surprise, tu me prends de court ; cesseras-tu de me surprendre un jour ?
On va devoir parler, tu sais… de ce qu’il s’est passé. Et de la drogue, Ange. Sérieusement. Un rire maussade gratte le fond asséché de ma gorge—vraiment ? J’en aurais oublié le caractère illicite de mes besognes, et ton oeil acéré qui n’en avait raté la moindre miette. Eh ben, je vais commencer pour toi. Je suis désolé d’avoir disparu, j’ai été lâche. Mais je n’ai aucun regret, sans ça il serait—il— ah, mon souffle, rendez-le moi ; si vous n’avez pas pris Tsubaki, laissez-moi. Et pour… pour le reste, pour ce que j’ai fait, je dirai pas pardon. J’en ai besoin, et tu le sais. Les efforts de cet été, c’était du vent, c’était temporaire. Qui je serais, sans ce bonheur ?
Si c’est Ange que tu désires, prends-le tel qu’il est.
Yume Ueda
Citation : But It's Better If You Do
Age : 18 (8/11/79)
Ryujin
Yume Ueda
A little time with you is all that i get
That’s all we need because its all we can take
One thing I never see the same when you'r 'round— Instant Crush // Daft Punk
Now I thought about what I wanna say
But I never really know where to go
Maintenant.
Tu commences – ça me soulage, je l’avoue, je ne sais jamais vraiment pas où commencer, ni comment procéder et –
Je pense que tu le sais.
Ta disparition, au moment où les groupes se sont formés, je n’y pensais plus vraiment. Tout s’est passé si vite et, dans la foule, je ne sais même pas si j’aurais pu te trouver ; mais ton patronus avait suffit à me rassurer.
Ton souffle se coupe, mais je choisi de ne pas t’interrompre maintenant que tu es parti. Et pour… pour le reste, pour ce que j’ai fait, je dirai pas pardon. Je me crispe un peu, cette fois, sans savoir à quoi je m’attendais réellement – à ce que tu me dises qu’il ne s’agissait que d’une erreur, peut-être, et que tu le regrettes. J’en ai besoin, et tu le sais. Ca, je suis prêt à l’admettre. La situation était particulière, on a tous fais des fautes. Les efforts de cet été, c’était du vent, c’était temporaire.
« Temporaire ? Mais – Ange ! »
J’essaie, vraiment, mais c’est plus fort que moi. J’aimerais comprendre – mais j’ai si peur de te perdre trop tôt.
« Tu sais déjà ce que j’en pense. »
Il y a plus de peine que de reproche dans ma voix, mais je tente de me reconcentrer sur le sujet – c’est à mon tour, je suppose, de m’expliquer.
« Je suis désolé d’avoir pris des risques inutiles. Et de pas avoir répondu à tes questions. Et d’être parti, quand on était dans le tramway. Mais si on devait recommencer, tu sais, je ferai pareil, parce que c’était trop pour moi, à gérer. »
Et si cette situation m’a bien appris quelque chose, c’est que je suis incapable de bien réagir en situation d’urgence – je fais tout de travers, comme à chaque fois que quelque chose ne va pas.
Ange Ueda
Citation : risus abundat in ore stultorum -- à la bouche du sot, le rire abonde
Age : 17 (29/02)
Rang : 60/100 dsl
Amaterasu
Ange Ueda
Il est là, fiché dans ma gorge—il la serre et m’étouffe de l’intérieur et si je m’accroche à ce que tu dis, si je ravale quelques sanglots, c’est grâce à elle et à ses mains douces et à ces sourires qu’elle dessine sur mes lèvres. Je suis désolé d’avoir pris des risques inutiles. Et de pas avoir répondu à tes questions. Et d’être parti, quand on était dans le tramway. mais si on devait recommencer, tu sais, je ferai pareil, parce que c’était trop pour moi, à gérer. Ah.
Ce qui me brûlait cette fois me glace le sang ; je me sens tanguer entre la colère et la tristesse et si j’enchantais un papier serait-il violet ou céruléen—s’enflammerait-il entre mes doigts ? Tu dis toujours que t’es désolé. Constamment. Je t’ai pas vu ne pas t’excuser depuis des années, mais tu continues à faire les mêmes conneries, encore et encore et encore et—je griffe les bandages et enfouis un doigt dans ma plaie et—et ah, la douleur me ramène. Je veux pas savoir que tu t’en veux, mais pourquoi tu l’as fait. Tu m’as abandonné deux fois, et tu dis que tu recommenceras. Pourquoi ? Pour qui ? Je vaux si peu ?
Si peu que t’es incapable d’accepter qui j’aime, alors que moi—que moi—non, c’est faux, je suis pas mieux—j’ai cru qu’il était mort, et que tu voulais pas me le dire. Je comprends pas, Yume, est-ce que t’es obligé de détester Mamoru ? J’ai le souffle court et la trachée sèche et tout un paquet de larmes dans le gosier et j’ai peur que tout ce qui doit changer reste le même, que tout ce qui doive rester s’en aille. Tu recommenceras, parce que c’était trop. C’est vrai, c’était pas assez pour moi, après tout—voir Hotaru menacer de se trancher la gorge et—arracher un sabre planté dans Tsubaki, manquer de le tuer—frôler la mort de tous les côtés et toi, toi tu t’es dit ah! pourquoi pas sauver un parfait inconnu, au risque d’arriver trop tard pour mon cousin! Et ça déborde et ça dégueule comme des nuages au-dessus de ma tête—je savais pas qu’il restait des bouts de mon coeur, jusqu’à ce que tu les brises.
[/quote]
Yume Ueda
Citation : But It's Better If You Do
Age : 18 (8/11/79)
Ryujin
Yume Ueda
A little time with you is all that i get
That’s all we need because its all we can take
One thing I never see the same when you'r 'round— Instant Crush // Daft Punk
Now I thought about what I wanna say
But I never really know where to go
Ange, je – Tu dis toujours que t’es désolé. Constamment. Je t’ai pas vu ne pas t’excuser depuis des années, mais tu continues à faire les mêmes conneries, encore et encore et encore et— Et on en est donc au stade où on rouvre toutes nos plaies – tu t’en prends même à celle de ton visage ! Si je n’étais pas en train de me décomposer, je retirerai ta main pour y déposer un baiser ; je te ferai oublier que tu es blessé.
Tu as raison. Je ne cesse de me répéter – mes excuses et mes actes stupides. J’essaie, pourtant, de changer. J’ai l’impression d’avoir échoué.
Je veux pas savoir que tu t’en veux, mais pourquoi tu l’as fait. Tu m’as abandonné deux fois, et tu dis que tu recommenceras. Pourquoi ? Pour qui ? Je vaux si peu ? Non. C’est pas ça. J’ai –
Pourquoi on ne se comprend pas ?
« Je t’ai pas – »
J’ai cru qu’il était mort, et que tu voulais pas me le dire. Je comprends pas, Yume, est-ce que t’es obligé de détester Mamoru ? Quoi ? Ange, attend. Tu vas trop vite – comme toujours, tu laisses le flot de parole t’emporter et moi je ne sais pas comment me défendre ; toujours fautif et victime de tes paroles assassines (blessées).
Ça ressemble juste un énorme quiproquo, amplifié par nos émotions et le drame de la situation.
Et tu achèves – tu m’achèves ! – avec Hotaru qui menace de se tuer, Tsubaki transpercé, à qui tu as dû arracher l’épée et moi, qui tente de sauver un inconnu de ses fleurs implantées. Les larmes me gagnent, alors que je me refuse à les laisser s’écouler – j’ai encore à parler.
Je suis un peu sonné.
« Je me rendais pas compte, je murmure. J’étais sous le choc et je pensais pas prendre plus de temps que toi pour trouver les potions. Je voulais pas qu’il se vide de son sang ou de ses entrailles, si je refermais pas la plaie. »
Et je sais, maintenant que j’ai plus de recul, que c’était stupidement héroïque. Sauf que moi, je suis pas héro ; juste un ado un peu idiot.
« Je t’ai pas abandonné. Pour moi, c’était pas ça, je… voulais pas que t’en ai l’impression. J’ai juste voulu m’éloigner de Kiyo. Et de Mamoru. Et je voulais pas que tu crois qu’il soit mort. J’aurais pas… je t’aurais dit… ou – Je sais pas. Mais. J’aurais essayé de t’expliquer. »
Je reprends un peu de ce souffle que je malmène – je devrais cesser de paniquer ; les sanglots s’occupent déjà de m’étouffer.
« Ils sont venus me retrouver, quand on s’est échappé. Et Kiyo voulait que je le rejoigne, mais… je pouvais pas me mettre du côté de Seimei. Et il s’est énervé. Il m’a repoussé et Mamoru m’a dit de dégager – deux fois. Je suis parti et c’est là que je vous ai trouvé… Et merde, Ange, Mamoru en a après moi depuis des années ; si le problème vient de quelqu’un, je crois pas que ce soit de moi. Je veux bien faire des efforts pour toi, mais… je vais pas en faire, si lui n’en fait pas. »
Et c’est bête, parce que des efforts, on en faisait déjà – un peu. Et que ce jour-là, c’était comme une remise à zéro, pour tout le monde.
Ange Ueda
Citation : risus abundat in ore stultorum -- à la bouche du sot, le rire abonde
Age : 17 (29/02)
Rang : 60/100 dsl
Amaterasu
Ange Ueda
Aujourd’hui c’est nous que le vent déforme et c’est dans mes décombres que l’injustice fleurit. J’ai l’espoir égoïste que tout aille dans mon sens et de me réveiller d’un coup ; qu’on m’annonce que le monde va bien (c’est le cas, y a qu’à notre échelle d’adolescents qu’il s’effondre) et que c’était qu’un cauchemar. J’ai l’envie de m’enfuir parce que tous tes mots m’étouffent et m’encombrent le crâne comme du coton au fond de mon gosier—j’ai la bouche pâteuse, et les yeux mouillés.
Et je voulais pas que tu crois qu’il soit mort. Encore heureux, je ne dis pas. J’aurais pas… je t’aurais dit… ou — Je sais pas. Mais. J’aurais essayé de t’expliquer. Mensonge involontaire s’il en est, mon sourire découvrent mes doutes. Pas sûr. Et je dis pas ça méchamment, tu sais—mais moi quand j’ai vu Tsubaki étendu sur le sol, dans une flaque de son propre sang, et que je me suis demandé comment l’annoncer à son frère si je l’avais achevé, la réponse était simple : j’en avais pas la moindre idée.
Mais toi tu continues et c’est comme si quelque chose d’autre nous étranglait ; y a un merde qui se perd et une partie de moi qui ne veut qu’entendre tes reproches. Je les pousse et me dégage de mon propre égotisme au rythme d’un soupir frustré, reniflement dédaigneux trahissant des sentiments bien lâches. Vous en avez l’un après l’autre. C’est injuste, ce que je dis—alors, pour ma conscience craquelée, je poursuis. Je lui parlerai. Comme si j’allais changer quoi que ce soit. Comme je te parle à toi maintenant, mais peut-être un peu moins sanglant, les chairs moins à vif et les paupières plus sèches. J’espère.
T’aurais préféré mourir que le rejoindre, pas vrai ?
Tu l’ignores, mais j’ai vu tous mes amis d’un côté, alors même que je m’enfouissais de l’autre. J’ai regardé la haine et le mépris pour tous ces couards qui cherchaient à sauver leur propre peau, et j’ai poussé le vice à en prendre l’apparence d’un autre. Foutu syndrome du héros, je crache comme un lâche.
On en revient toujours à la même tragédie—toi qui crèves en martyr, et moi qui deuille en pleutre. Moi pas. Plus maintenant. Et s’il revient, s’il nous dit de choisir, je refuse de te voir mourir. J’ai jamais eu peur de la mort, jusqu’à ce qu’elle s’enroule autour de Tsubaki. Je déglutis, la gorge sèche et la voix rauque. Je crois que c’est trop tard pour moi, de toute manière. Avec tout ce venin dans les veines, j’ai même plus besoin de métamorphomagie pour saigner noir.
S’il me reste qu’une demi-douzaine d’années je veux pas la passer au-dessus de ta tombe, Yume.
Yume Ueda
Citation : But It's Better If You Do
Age : 18 (8/11/79)
Ryujin
Yume Ueda
A little time with you is all that i get
That’s all we need because its all we can take
One thing I never see the same when you'r 'round— Instant Crush // Daft Punk
Now I thought about what I wanna say
But I never really know where to go
Les enfants rêvent tous d’être adulte, avant que l’heure ne soit venue.
Adultes, nous rêvons de retrouver notre innocence d’antan.
Une époque où tout paraissait plus beau. Où chaque découverte nous émerveillait. Où les chagrins, futiles pour la plupart, se soignaient par poignées de sucreries. Où nos plus grandes craintes s’avéraient être les monstres sous le lit. Où seuls les jeux faisaient battre nos cœurs à tout rompre.
L’adolescence est cruelle.
Une transition entre la découverte des horreurs de notre monde et le besoin, encore, de rêver. Abandonner notre innocence, alors que nous ne disposons pas encore de la maturité nécessaire pour gérer le flot de nos émotions.
Je voudrais un retourneur de temps.
Je voudrais dire que j’effacerai chacune de mes erreurs ; mais en réalité : j’en profiterai pour réarranger le passé tel que je le souhaiterai. Tel l’égoïste, camouflé derrière sa pseudo altruisme.
C’est toi qui as raison : je m’invente des excuses. J’essaie de me rendre meilleur que je ne le suis ; incapable d’avouer mes tords. Tout juste bon à demander pardon.
C’est vrai ; je n’aurai probablement pas su t’avouer la mort de Mamoru, si elle était survenue. J’aurais attendu, surement, que tu le découvres autrement. Et j’aurais tenu ta main, t’offrant une présence réconfortante. Tu m’en aurais voulu de ne rien avoir dis et, quand tu aurais tourné ta colère vers moi, je me serai, une fois plus, excusé.
Et je t’aurais exprimé combien je suis inapte à annoncer de telles nouvelles, essayant – une fois de plus – de m’expliquer.
Je ne sais même pas comment vivre dans un monde où la probabilité d’annoncer à mon cousin la mort de son petit-ami existe.
Vous en avez l’un après l’autre. Je retiens une exclamation révoltée.
Je dois accepter l’évidence, qu’importe combien j’aimerais faire preuve de mauvaise foi. Mamoru et moi nous entraînons dans notre cercle de vices depuis bien longtemps.
C’est lui qui a commencé – je n’en démordrais pas. J’ai continué, cependant. Ce n’est pas davantage reluisant.
Je lui parlerai. Comme je te parle à toi maintenant.
« D’accord. Je – Je crois qu’il essaie déjà de faire des efforts. J’en ferai aussi. »
C’est idiot, d’entretenir un conflit d’adolescent, quand la guerre fait rage au dehors. Je le réalise, à présent.
T’aurais préféré mourir que le rejoindre, pas vrai ? Foutu syndrome du héros.
« Quoi – »
Je n’ai jamais dit –
Moi pas. Plus maintenant. Et s’il revient, s’il nous dit de choisir, je refuse de te voir mourir.
Ça n’a jamais été mon attention. Je n’ai pas –
Je crois que c’est trop tard pour moi, de toute manière.
Pourquoi est-ce que tu dis ça…
S’il me reste qu’une demi-douzaine d’années je veux pas la passer au-dessus de ta tombe, Yume.
… Je me fige dans le silence qui suit.
Je ne sais si mes larmes s’écoulent encore ou laissent mes joues se dessécher de leur absence.
« …Je l’aurais rejoint. Un murmure. Je… voulais seulement m’assurer que vous étiez tous en sécurité, avant de faire mon choix. Et si ça incluait de rejoindre Seimei… je l’aurais fait. Mais… tout est allé très vite et – je me suis laissé entraîner. »
Je n’ai pas de clan, à proprement parlé.
Je veux seulement être aux côtés des personnes auxquelles je tiens.
« Je ne veux pas me mettre inutilement en danger, Ange… »
Et quand je le fais, c’est que je ne le réalise pas réellement.
« Et tu es plutôt mal placé pour me faire cette morale... »
Je ne veux pas être froid. Ni cassant.
Mais, enfin – ah. N’es-tu pas le moins raisonnable de nous deux ? Ne suis-je pas celui qui dois craindre de perdre l’autre ?
J’ai peur, Ange.
J’aimerais revenir des années en arrière, ne serait-ce que pour retrouver notre innocence d’antan. Ne serait-ce que pour tenir tes doigts et ne pas penser à tout ce que nous allons casser, entre nous, des années plus tard.
Ne serait-ce que pour te serrer dans mes bras et ne pas avoir à songer que, peut-être, ce pourrait être la dernière fois.
Ange Ueda
Citation : risus abundat in ore stultorum -- à la bouche du sot, le rire abonde
Age : 17 (29/02)
Rang : 60/100 dsl
Amaterasu
Ange Ueda
J’inspire, profondément — tristement, je me tais. Et tu es plutôt mal placé pour me faire cette morale…
C’est vrai. Le mutisme me ronge les sangs et ce sont eux qui bouillonnent dans mes veines, eux qui poussent mes crocs à déchirer la peau fragile de mes lèvres. Ok. Ce jour-là, j’aurai pu mourir — et je suis là, à blâmer un autre pour tout ce qui murmure dans mes oreilles d’en finir, une bonne fois pour toutes.
J’aimerais dire que tu suffis — que vous suffisez. Que celui qui disait que vingt ans c’était assez long avait été étouffé, morcelé par tout ce que vous vous risquez à me donner. Mais ce qui pèse sur mes épaules, c’est la haine : sa haine. Elle a toujours été plus lourde, plus pressante — elle a toujours pris le pas sur le reste et aujourd’hui c’est la mienne qui dépasse l’entendement.
Faut que je m’en aille. Mâchoires serrées à s’en broyer les dents, les ongles enfoncés si profondément dans les paumes que la piqûre retient le venin de ce qui macère dans mon crâne. Autopilotes, mes jambes me décrochent de cette scène infâme ; je veux pas te blesser, mais toi tu m’as ouvert les côtes en quelques mots cruels, tristement mérités. On en rira un jour — assez vite, j’espère, parce qu’au final mes vingt ans me paraissent un peu trop hors de portée, trop loin pour que mes doigts l’attrapent.
J’allume sur mon sillage un brasier faiblard, prémices mort-nées d’une dispute idiote. Crois-moi, Yume, j’éteindrai ces flammes moi-même un autre jour. La porte se claque, et ma lèvre se fend ; le sang ne m’a jamais paru si amer.
|
|
|