— MAHOUTOKORO
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damage control (ueda)
Ange Ueda
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Citation : risus abundat in ore stultorum -- à la bouche du sot, le rire abonde
Age : 17 (29/02)
Rang : 60/100 dsl
Amaterasu
Amaterasu
Ange Ueda
https://mahoutokoro.forumactif.com/t126-l-etoile-a-pleure-rose-ange
https://mahoutokoro.forumactif.com/t223-uu
Ange Ueda
choking on halos that angels buried six feet under
Deux mois privé de soleil, et il lui avait fallu vingt-quatre heures supplémentaires pour se risquer à en profiter ; baigné sous ses rayons d’aurore, assis sur le parquet du patio, il contemplait l’éveil du jour d’une paire d’yeux fatigués. Son front, bandé plutôt que magiquement guéri—il en avait exprimé le souhait, l’iris luisant d’abandon et il avait dit s’il vous plaît qu’on lui laisse la cicatrice, qu’on lui prouve que c’était vrai—et ses doigts serrés sur un manche invisible. Oh, il avait fallu arracher le sabre de Tsubaki de ses mains fébriles, et même sans l’arme il se sentait prostré par un poids d’une toute autre nature. C’était la culpabilité qui l’accablait, et Ange n’avait plus qu’elle pour escorter ses nuits blanches, à peine grises.

Il avait écouté le souffle faible de son cousin le temps de mille soupirs et s’était penché sur les battements épars de son coeur éprouvé, conscient que ses bras fragiles avaient failli lui coûter la vie, que son office couarde aurait pu décimer ses pairs. Derrière ses paupières closes se peignaient de bien tristes tableaux—la gorge d’Hotaru ouverte par un éclat de verre et de sa propre initiative, le corps sans vie de Tsubaki, pourfendu de sa propre épée et bien sûr, Yume écrasé sous les décombres qu’Ange lui-même avait fait tomber sur eux—et le sommeil ne le happait guère plus qu’avant, repos trouvé en micro-siestes sporadiques au chevet de l’héritier blessé.

Demeurer à ses côtés avait eu un avantage éminent : il avait été le témoin direct, bien qu’amorphe, de conversations terrifiantes. Satoshi Ueda, bourreau de ses cadets et successeur au trône de Masamune, avait été arrêté et incarcéré suite à ses méfaits, son oeuvre au sein des partisans de Yuutsu enfin dévoilée ; le scandale avait été soigneusement étouffé, gracieuseté de l’émérite époux de Sumie. Mais cette arrestation soulevait un débat bien macabre : la mort du chef approchait à grands pas, quand bien même se ménageait-il au possible, et Tsubaki n’était prêt à s’emparer de son auguste flambeau. Ange avait vu, dans le regard de son grand oncle, une inquiétude plus paternelle que menaçante—non, nul mal n’allait être fait à son tendre cousin, se convainquit-il, dût-il veiller sur lui dans l’ombre de ses études.

La plupart des nuits, il écoutait Mamoru dormir à ses côtés, rassuré par sa présence ; d’autres, pourtant, elle ne suffisait à l’apaiser et Ange finissait par errer le long des bordures de la demeure, à compter les étoiles en attendant qu’elles cèdent leur place à leur comparse. Ce matin-là, c’était maussade qu’il se traînait jusqu’au salon, encore exempt de la présence de ses pairs ; Ange salua les serviteurs, qui s’affairaient à installer le gigantesque kotatsu au centre de la pièce, et n’hésita pas un instant avant d’y glisser son corps frigorifié, reposant son front meurtri contre le bois de la table. La piqûre des plaies qu’il persistait à rouvrir tira un frisson à son échine, l’empêchant de sombrer dans le sommeil sous la chaleur du kotatsu. Les domestiques s’extirpèrent des cuisines pour apporter le petit déjeuner, et le faux prince ne prit la peine de les aider—mais il les remercia chaleureusement, un sourire tout fait soulevant les commissures fatiguées de ses lèvres.

Là, alors que chacun émergeait de la nuit dans l’espoir de manger, sourd à la pression qui persistait à broyer leurs épaules, Ange soupira. Je veux pas retourner là-bas, confia-t-il bravement—lâchement. Je veux pas retourner à Mahoutokoro. Et entre ses doigts, les baguettes se rompirent.




Saburoo Ueda
oui
Citation : How call someone with no body and no nose? Nobody knows.
Age : 46 (05/06)
Rang : S1
Orochi
Orochi
Saburoo Ueda
https://mahoutokoro.forumactif.com/t1330-hic-sunt-dracones#10612
https://mahoutokoro.forumactif.com/t1424-salve-regina
Saburoo Ueda

D'ailleurs c'est toujours les autres qui meurent Extirpé à l’aube de sombres réunions : Saburoo, le pas allant sur l’engawa de l’immense demeure familiale qui voyait voguer nombres d’hôtes ruinés par les incessants débats nocturnes.


Adieu puîné !
Que ces années maudites m’en soient témoins ; le roi se meurt et son prince perché dans sa tour effroyable est évincé par un sort auquel nul ne peut se soustraire. Les voilà pestiférés par leurs propres maux ! Ces jours seraient festifs et dignement célébrés si l’heure n’était pas si grave sous les éclatants débats qui menaient nos existences : à force d’y plier l’échine et d’y courber le cou je n’ai que trop eu l’occasion de contempler le tatami —affreux, d’ailleurs.  

Une fois encore— la lune absorbée par sa veille sérénissime n’a daigné m’accorder le moindre répit, et bien qu’ai-je pu cueillir du bout de mes doigts les étoiles écloses sur l’infinie toile de la nuit, l’abstention d’une telle tâche ne m’en aurait vu que soulagé. Car aux confins de ces noires heures c’est une malheureuse berceuse qui se trouve chantée au gré d’un chœur fort asymphonique : l’épais ténor des mâles érigés en noctambules aguerris ponctué des jérémiades tonnantes de sopranos féminins aux revendications féroces. Ainsi se poursuit chaque nuit le concerto en mi-sérables mineur aux tonalités si tant immondes que criardes, les gosiers arrosés d’un saké putrescent trop longtemps vieillit dans nos veines flétries que quidam ne peut se targuer de connaître.
Les grandes et nobles familles ont cela en commun qu’une fois lancées sur des sujets épineux à la force d’un cheval au galop elles n’en démordent guère jusqu’à ce que nul détail ne manque à y être soulevé, qu’examinée soit la moindre des coutures béantes sous leurs yeux rapaces et ceux-là mêmes n’hésitent aucunement à remuer la poussière de dogmes abscons qui auraient mieux fait de demeurer enfouis par les siècles. Un entier vacarme à la simple excuse d’y trancher quelques nœuds gordiens.

Toutefois en ces jours l’inquiétude ne pèse pas tant sur la perte d’enfants anonymement morts, mais sur celles ô combien plus substantielles de l’héritage et de l’honneur : car la perte de ce dernier guette à nos portes, armée de son glaive vengeur en quête de la moindre faiblesse, et l’héritage est une affaire d’estime qui ne peut se régler qu’en famille. Et le monde entier sait que les réunions de famille sont agréables.
Père, ce diable patriarcal du haut de ses cent-quarante-sept années n’a guère émis le plus infime frisson lorsque la crue et risible Déconvenue lui fut présentée sur un plateau auquel toute pureté de l’argent eut été ôtée : son Héritier entré en déshonneur, une indigeste vérité qui n’osait s’affranchir des lèvres des hôtes curieusement scellées par une fausse pudeur. Pourtant, perdu entre le pli sévère de ses sourcils et l’alganon de sa mâchoire de silex, pas un soupçon de faiblesse, pas un souffle manqué ni de bond malvenu de son myocarde : Masamune n’est rien si ce n’est une inébranlable bastille taillée dans la plus solide des roches ; aurait-il brusquement trépassé sous la nouvelle que nul ne s’en serait aperçu.
Après tout, le conseil de famille a coutume de désapprouver l’échec, et au registre de celui-ci, la faiblesse est maîtresse : aussi les rides se doivent de demeurer sagement à leur place. Faut-il en pleurer que je souhaite désespérément en rire, mais l’austérité siège en maître incontesté parmi ces hommes si ce n’est pour la franche fraîcheur d’Hidejiroo— roi des rois au règne des incontestables.

Sagement assis et sagement fils, dernier de mon espèce, j’ai attendu un regard de Père.
Et j’attends toujours.  

Je ne peux que ressasser tous ces sucs alors que l’aurore pleure ses rayons sur ma tête en m’assommant de sa lumière, le pas claquant sur cet increvable tatami. Engouffré dans ce salon maudit duquel fuient les serviteurs, échu aux côtés d’un sang neuf, mon tympan vibre sous le lamento de mon neveu.
Ah mon cher Ange, je ne peux qu’être d’accord. Mahoutokoro est une enclave, et tragique à cela. A l’instant même où je poserai un pied sur l’île, je serai enchaîné à des réunions sans fins, des commis du ministère planant sur moi comme des vautours affamés— tout du moins le dépaysement ne sera pas malvenu. D’un geste, je lui présente une nouvelle paire de baguettes, adroitement substituées à une place vacante qui ne souffrira guère d’une telle perte. Il va falloir faire preuve de force et de courage, Ange.

Mangé par la masse sauvage de sa chevelure, le bandage couronne son front d’une triste souveraineté, et mu par une irrépressible affection ma main balaye les quelques mèches qui tapissent sa frange pour les lisser maladroitement. Le brun te va bien. Pardonne-moi, dans toute cette débâcle je n’ai pas eu beaucoup de temps pour toi : comment te sens-tu ?