Une soirée sous le signe d'un agacement certain, outrepassé par la stupidité déconcertante de médiocres performances écrites. Un examen annoncé bien assez tôt, très vite effacé des esprits : une telle certitude, quant à elle, trouvait refuge dans la navrante vacuité des copies rendues—et au terme d'une bonne heure dédiée à la pédagogie, Takeo était sorti prendre un peu d'air. Une simple allure confortable, davantage fidèle aux codes moldus, la quiétude de tels instants lui aurait presque fait reconsidérer le désir de fumer, s'il ne tenait pas tant à ses plantes : en sacrifier les douces existantes pour une piètre dépendance, tout cela n'en valait pas la peine.

De si intenses réflexions, pour un cerveau aussi modéré, avaient mené l'enseignant aux abords du bâtiment dont il avait commencé à gravir les étages. La salle de divination, du peu qu'il l'avait visité, disposait d'une ambiance toute particulière, qu'il avait appris à apprécier : s'il ne s'entendait pas à merveille avec sa principale locataire, sa curiosité suffisait à combler un tel ressenti.

Une quiétude rarement ressentie chez lui, mais hélas vite coupée court par un boucan alentour : lorsque flopée de personnes s'immiscèrent dans sa silencieuse contemplation des alentours, Takeo envisagea la possibilité d'une blague collective—mais les concernés n'étaient pas propices à ce genre d'écarts. Très vite, la salle était presque plus occupée qu'en période scolaire—une vision certainement euphorique pour son enseignante ci-présente.

La situation était anormale.

Un regard adressé aux quelques élèves présents, la surprise se ressentit sur le visage d'un sang-mêlé non-mécontent de retrouver Fuyuki ; la présence d'Asagao, quant à elle, lui arracha une grimace. Un tapotement sur sa cuisse rassura le botaniste, sa baguette restait à sa fidèle place et ne lui ferait pas défaut dans une soirée qui s'annonçait dangereuse. Son regard, comme un réflexe, s'attarda sur la personne à qui il faisait le plus confiance, Fuyuki.

Qu'est-ce qu'il se passe, au juste ?

L'humour s'en était allé, son esprit incapable de se laisser gagner par la moindre sornette : en la présence de ces innombrables assaillants, dans un danger frontalier au désespoir absolu, même sa plus vive concentration ne garantissait pas de les tirer de cette terrible situation.

Une fois encore, à l'image des précédents événements qui avaient su stimuler son sens du devoir, Takeo n'accorda qu'une éphémère pensée à sa serre qu'il savait proie aux véhémences de ces créatures fantastiques : si les plantes ne représentaient qu'une amorphe créature indigne d'intérêt pour tout sorcier en âge de ses premières poussées d'hormone, le botaniste soupçonnait les yôkai d'être d'une autre trempe. L'inquiétude avait beau distraire ses pensées de l'instant présent, l'idée de retrouver une serre intacte lui semblait d'autant plus vexante que d'en constater les ravages—une poussée d'égo qu'il garda néanmoins au creux de son silence.

Sans tergiverser davantage, Takeo murmura un Salveo maleficia dont il craignait l'inutilité : repousser les maléfices ne serait certainement d'aucune utilité face à ces créatures. La mesure se vit compléter de Cave inimicum et Protego Totalum en quoi l'enseignant fondait bien plus d'espoirs—et avec un peu de chance, si tant est qu'ils n'en avaient pas épuisé le capital en survivant jusqu'à maintenant, les yôkai ne trouveraient pas cette salle.

La précision paraît superflue, mais vous êtes bien évidemment toutes en droit d'utiliser vos baguettes. Fuyuki, veux-tu bien compléter mes défenses s'il te plait ?

En cela, Takeo pensait aux compétences calligraphiques si rares, et dont les siennes n'outrepassaient pas la médiocrité. Il jeta un bref regard au bel étalon, ne s'attardant pas sur le large vêtement qui cachait ses jolies formes : une fois de plus, le sens vestimentaire des sangs-purs le laissait dubitatif, mais Takeo n'avait pas le loisir de s'en soucier—dans sa soudaine idée, Himawari avait raison.

Mes sortilèges sauront vous gagner assez de temps pour répondre de cette excellente suggestion, miss Manami. Travaillez sans crainte.

L'animosité reliée au second plan, un ton aussi professionnel qu'en des temps pédagogiques—et sous couvert de ce rare sérieux, Takeo semblait presque méconnaissable. Placé plus proche de l'entrée que ses congénères, sa baguette en main, prêt à assumer les responsabilités de leur protection.

Avec patience, mais non sans agacement, il fut témoin de l'incertitude d'un ami qu'il savait talentueux : Fuyuki n'était peut-être qu'ébéniste, mais sa lignée était aussi prestigieuse que son enseignement—garantissant, tout hésitant qu'il fut, un minimum de résultat. Mais sans rien ajouter, Takeo laissa la suite à la préfète-en-chef, digne de son rôle ; dans une remarquable présence d'esprit, la sang-pur invoqua les services de sa créature pactisée.

Bien qu'inconfortable quant à la présence de la yôkai, Takeo se garda d'un quelconque commentaire, conscient de leur indécrottable susceptibilité—il y avait assez d'ennemis dehors pour qu'il n'accepte de s'en faire un supplémentaire. Pour l'occasion, il avait noué d'une trêve tacite avec Asagao, ce qui représentait un exploit suffisamment marquant.

Orochi serait donc notre potentiel ennemi.

De frustration, il tenta de se remémorer les bribes de légende qu'il avait autrefois étudié. Si désintéressé qu'il fut, Takeo admit qu'elles semblaient plus utiles que l'anatomie de ses douces fleurs.

Rassemblons nos connaissances sur le sujet. Tout mythe s'inspire de vérité, et peut-être y trouverons-nous un indice susceptible de nous venir en aide.

Puis, se tournant vers Himawari :

Serait-il envisageable de contacter Takumi ? Ses connaissances nous seraient cruciales, et lui transmettre cette information peut l'être tout autant.