ANAMNESIS

C’est un jour sans soleil, un jour sans empereur, un jour sans magie.
Un jour de deuil.
Ce sont des nuits sans sommeil, un avenir dont il a peur, des cauchemars ayant envahies son esprit.
Leur société pour écueil.

Azrael ne parvenait à se croire en vacances – le mot, lui-même, avait perdu son sens au cours de ces dernières années. Il ne savait même plus s’il y aurait, pour lui, une rentrée – pourrait-il faire face à certains de ses collègues, après ce qu’il s’était passé ? Pourrait-il encore enseigner, en toute neutralité ?

Ses blessures n’avaient tardé à guérir, malgré la cicatrice laissée par la dernière blessure que Takamori lui avait infligé. Sa sortie d’hôpital avait été la bienvenue, l’homme ne supportant plus l’enfermement. Il avait besoin de retrouver ses proches et des amis qui pouvaient avoir besoin de compter sur lui. Il avait besoin de prendre l’air et de se retrouver un peu seul. Pour autant, il n’avait jamais vraiment Ogino Ginko, y revenant chaque jour pour y voir le plus grand de ses fils.

Ashe était sauf, mais il ne s’en était pas sorti sans dommage. Sa main et, surtout, sa tête avaient été blessées, lui valant cette hospitalisation prolongée. Ce n’était pas la première fois qu’Azrael passait du temps à veiller au chevet du jeune garçon et il osait espérer que ça ne deviendrait pas une habitude – mais au point où ils en étaient désormais, son optimisme se trouvait au plus bas.

Ritsuka était souvent là, lui aussi – plus, surement, qu’il ne le devrait. Mais le professeur avait beau souhaiter que le jeune sang-pur prenne soin de lui aussi, il ne pouvait que respecter et louer son choix. Ils s’étaient accordés à couvrir le plus de temps possible, en alternant leurs visites ; ce qui ne les empêchait pas de se retrouver, par moment.

Il venait d’entrer, justement, dans l’hôpital, attardé par les nouvelles de la journée – mais aussi par les moyens de déplacement, dont il n’avait pu disposer. Sans transplanage, il se sentait particulièrement limité.
(sans magie, il se sentait aussi vide qu’handicapé)
Des acouphènes le gênaient, encore, lui faisant parfois chercher l’origine de sons qui n’existaient pas. Le hurlement ne lui laissa cependant aucun doute sur sa réalité, pas plus que sur son origine – il reconnaîtrait ceux d’Ashe parmi des milliers.

Il se précipita jusqu’à la chambre, s’inquiétant déjà du pire. A l’intérieur, il découvrit, avec soulagement, que le jeune Miura s’y trouvait déjà. Le plus jeune ne semblait pas davantage blessé, mais les quelques mots qu’il prononça suffirent à lui faire comprendre ce qu’il venait d’arriver.
Kai.
Le nom, à lui seul, expliquait toute la souffrance découlant de ses larmes.

Sans oser dire un mot, il s’approcha à son tour et déposa une main dans les cheveux de son enfant.
Ils étaient là, s’il lui fallait parler. Ils étaient là, aussi, pour lui rappeler qu’il avait des personnes sur qui compter.
Ils étaient là, pour le réconforter.