I missed you my (rein)deer
05.11.97
Les os craquent sous les mouvements larges et lents effectués pour faire travailler ses muscles engourdis. Arpentant les couloirs, il comptait se rendre au dortoir pour étudier pendant quelques heures de pause, mais le profil élégant d’un Tsukino se démarque et force un sourire sur les traits fins du yatagarasu. Contrairement à l’éthique souhaitée par leur rang, la joie d’être simple élève en ces lieux leur conférait ce privilège de se comporter comme bon leur semblait et la meilleure idée qui leur soit venue consistait à se plaquer au mur le plus proche. Une façon plutôt brusque de se dire bonsoir tout en étant relativement intime, car aucun des deux ne s’amusait de la sorte avec d’autres personnes. Ce traitement était exclusif aux jumeaux, particulièrement Akshar avec qui il avait confondu la toute première fois son double.
De sa démarche plus rapide, il réussit à atteindre le concerné pour l’empêcher de progresser dans l’allée désormais vidée de son monde. La plupart avaient emprunté le chemin inverse pour sortir ou reprendre leurs cours, qu’importe, une main se plaqua au mur et son regard se fixa dans celui de son ami, son sourire carnassier toujours présent. « Quel plaisir de te voir mon très cher caribou sucré ~ » ce n’était pas comme s’ils avaient souvent l’occasion de se croiser étant donné le lien particulier entretenu avec son frère dont le surnom était tout aussi ridicule, trouvé dans le but de les agacer et de plaisanter. En conséquence ne se plaignait-il pas du sien affublé en réponse pour lotir équitablement la gêne qu’ils auraient pu ressentir. Il n’en était rien en vue de leurs réactions et de la complicité construite autour d’un sujet plus que contrariant à la base, notamment pour les deux frères. Parfois, Hanru se disait que la répartition par l’éventail, quel que soit le mystère qui l’entourait était justifiée pour leur séparation. Il n’imaginait pas l’état de leur chambre s’ils avaient été tous trois dans la même maison, quoi que, le style adopté n’aurait pas été un problème si tenté que leur goût pour le traditionnel s’était avéré un point commun.
L’Awataguchi s’éloigne pour laisser un peu plus d’espace au Tsuchigumo, croisant les bras en attendant sagement la réaction de son caribou sucré.
Oh qu’ils répugnaient mon âme, eux qui n’avaient pour seule capacité que d’abrutir l’humanité.
C’est d’un pas pressé – de rejoindre un lieu de paix – que j’avançais dans les couloirs presque vides du troisième étage. Envieux d’enfin me reposer, trouver la sérénité auprès du silence ou de quelqu’un plus instruit que ceux qui avaient discutés d’idioties moldues.
Des chiens qui devraient apprendre à se taire plutôt que d’aboyer sans raison.
Et alors que je songeais déjà au repos mérité,
Voilà que je me retrouvais – comme à notre bête habitude – collé contre un mur.
Sourire amusé, un regard complice, les traits tirés par un certain dégoût face au surnom donné.
La première fois, j’avais le sentiment de mourir d’une syncope.
Confondu avec mon étoile du nord, mon frère, il était arrivé et m’avait affublé d’un surnom sucré, mes traits s’étaient tirés sous la surprise – une légère nausée me creusant l’estomac.
Pourtant, cette petite manie ne s’était pas éteinte une fois le malentendu dissipé et il était devenu normal de se plaquer contre un mur lorsqu’on remarquer l’autre au loin.
Ce qui était, je l’avoue,
Cocasse.
Simplement, bien qu’un peu répugné sur le début, l’idée d’emmerder l’autre – gentiment – avait dépassé le mépris qui nouait ma gorge.
Peut-être était-il à mes yeux un ami.
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05.11.97
Canard sucré, tels étaient les mots qui avaient roulé sur la langue du Tsukino. De leurs sourires ne se lisaient que la tension du titillement de leurs nerfs. Et pourtant, s’il était désagréable d’être affublé de surnom, Hanru pouvait bien le supporter pour observer toute la malice de son compagnon d’infortune. Victime ou bourreau, souvent l’un devenait l’autre et inversement, puisqu’il n’y avait nulle raison autre que leur amusement personnel à venir troubler le sérieux du plus calme d’entre eux.
L’Awataguchi reprit position, laissant l’espace nécessaire à son vis-à-vis pour ne pas jouer sur sa patience, plutôt partisan d’une explosion fulgurante que d’un calme soutenu en cas de pari sur le nombre de minutes à encaisser ses imbécilités. Par ailleurs, en parlant d’idiots, il s’offusqua lui-même, gratifiant son ami de son soutien, son sourire s’effaçant aussitôt. « Ça me navre que nos professeurs soient si indulgents et que tu en pâtisse en plus… » il ne tint pas à finir sa phrase, sachant qu’il aurait peut-être à esquiver pour l’arrogance dont il faisait preuve en impliquant que cela le touchait plus que de coutume. C’était cependant un fait, il dépréciait complètement le comportement d’étudiants trop peu concernés par leur avenir. « Le cours de maniement du sabre s’accompagne d’une pause dans nos horaires, je comptais en profiter pour étudier quand je t’ai croisé. Tu me distrais trop » le sérieux de son intonation et de sa posture n’allaient pas du tout avec ses mots, de quoi rassurer le tsuchigumo sur ses intentions si tentées qu’il eut cru une seule seconde aux déclarations du yatagarasu.
« As-tu un peu de temps à m’accorder ? Ta compagnie m’est toujours agréable » il espérait qu’entre deux de leurs cours respectifs, ils puissent converser un peu. Le taquiner était toujours très important, il avait son petit rituel d’enquiquiner au moins une fois par jour son colocataire, bien que ce chiffre soit dépassé de loin pour le nombre de coussins qu’ils s’envoyaient dans la tête, ceux d’Akashi compris, dans le plus grand secret. Cette moustiquaire agaçante devait chaque fois être remise en place par leurs soins au risque de rendre son cousin – malade – ce qui était un bien grand mot. Rien qu’en y pensant, à tout bien réfléchir il préférait largement passer son temps avec Akshar que de faire face au voile disgracieux anti-insectes.
Quand bien même il parvenait à en rire l’instant d’après.
Et conscient de ce fait, l’Awataguchi s’était rapidement éloigné de lui, permettant au Tsukino de respirer calmement, de relâcher la pression qu’il imposait à son corps – inconsciemment.
Son visage se déforma un instant, répugné par les sentences du jeune homme.
Et il ne voulait que son bien.
Il posait son dos contre le mur, observant de manière méprisante un autre élève passer au loin, ces jours-ci – comme de nombreux autres – Akshar était sur les nerfs.
Tout ça à cause de son ignoble chambre. Auparavant, le Tsukino arrivait bien mieux à tenir ses émotions. Las, il soupirait un instant.
Il le comprenait un peu, certaines bestioles étaient répugnantes, mais il y avait tout de même des limites.
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05.11.97
Le sourire était éclatant, mutin dans l’absence de ses dents blanches qui auraient eu vite fait de rendre le Tsukino moins agréable. Hanru savait parfaitement à quel point les frères étaient sanguins envers tout être incapable de faire un minimum honneur à sa place ici et justement, il avait fallu qu’un de ces cas de figure se présente pour entacher la journée d’Akshar. Un soupire passe les lèvres de l’Awataguchi dont les yeux se ferment en claquant sa langue trois fois de suite contre son palais. « Ta franchise est telle que tu risques bien plus en lui faisant prendre forme qu’eux par leurs torts » il en fallait bien pour exprimer tout haut ce que les clans pensaient, tous sans exception. Individuellement, peut-être en était-il autrement, mais rares étaient ceux qui pouvaient se permettre de penser hors des sentiers. Et si à l’égard des nés-moldus et sangs-mêlés, le yatagarasu n’avait rien contre, il se pensait supérieur sans pour autant l’exprimer. Ça ne lui vaudrait que des conflits et des relations négatives dont il ne voulait pas. Philosophie d’un clan qui avait comme alliés tous les autres et qu’il respectait du plus profond de son âme.
D’humeur taquine, il provoque toujours l’araignée qui s’insurge toujours de ses mots, mais acquiesce quant à la magnificence de sa personne. Étonnant ? Pas vraiment, Hanru préférait cela, largement et n’allait pas à l’encontre de cette affirmation. « Ravi de savoir que tu m’accordes assez d’importance pour être à tes côtés quelques minutes » il lève les yeux au ciel, lui-même navré d’être si épris de leur petit jeu qu’il en venait à trouver trop aisément quoi répondre et avec une facilité déconcertante.
Lorsque le sujet tourne autour d’Ishvar, il est question d’inquiétude, ce que n’a jamais caché le Tsukino pour son double et que pouvait comprendre Hanru pour avoir lui aussi un petit frère et porter sa famille dans son cœur. Il ne voulait pas mentir cependant. « Je pense beaucoup aider en l’embêtant au contraire et si j’avais connaissance d’un quelconque danger tu en serais le premier informé » après tout n’était-ce pas ce que le mot ami signifiait ? Sans porter une dévotion totale à quiconque autre que son clan, il n’était pas interdit d’éprouver le besoin d’aider et de voir ses proches aussi sereins que lui pouvait l’être.
« Akashi… sera toujours étrange. Il essaye toujours de sortir Azuki de la pièce. S’il savait qu’on utilise ses meubles autant que les nôtres quand on se chamaille avec ton frère, je crois qu’il n’y survivrait pas » dit-il, non sans avoir un léger sourire à l’idée de vouloir le faire. Il était question d’importuner son cousin et c’était toujours un plaisir quand celui-ci se montrait trop agaçant pour si peu. Et c’était toujours le cas. Bien sûr, il ne risquait pas de mourir vraiment, en quel cas il n’en aurait pas ri. « Qu’en est-il de ton côté ? C’est toujours compliqué, je suppose ? »
Un léger rire lui échappait pourtant, un regard sombre jeté vers Hanru, alors même qu’il était amusé de la situation. Il gardait ses bras croisés contre son torse, un soupir fatigué échappant à ses lippes, peut-être irait-il faire une sieste tout à l’heure, il n’avait pas une grande journée.
Un hochement de tête en guise de réponse, car il n’avait rien à ajouter vis-à-vis de Akashi qu’il ne connaissait que trop peu.
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05.11.97
Dans cette colère ou le verbe était menace, il n’y avait de glacial que le regard méprisant du Tsukino et si Hanru s’était empressé de lui en faire perdre le fil. Tous deux avaient besoin de distraction, autre qu’insulter ceux qui de toute évidence ne valaient pas leur attention. Pour lui, ça ne faisait aucune différence qu’ils puissent respirer le même air tant qu’ils n’étaient pas contagieux et ne privaient d’autres de leur rang entre les murs de Mahoutokoro. Ce qui était impossible. Aucun clan n’aurait toléré pareille absurdité. « À t’entendre, si j’avais été idiot tu aurais été de bon conseil, laisse-les courir à leur perte » moins d’imbéciles, plus de sérieux ils y gagnaient au change dans tous les cas.
Si la gêne qu’ils occasionnaient persistait en revanche, ils allaient devoir les entendre l’un ou l’autre et profiter peut-être d’une leçon de vie qui leur serait enseignée sans nécessiter de leurs avis. Pour l’heure, ils avaient mérité quelques minutes de liberté et d’esprit. Et dans celui d’Akshar, il y avait les doutes concernant l’état de son double, partageant une chambre avec l’Awataguchi. L’agressivité avait été réduite au silence pour mieux laisser le doute et l’inquiétude se frayer un chemin sur les traits de son vis-à-vis. Même s’il n’en disait rien, c’était tout naturel et d’un hochement de tête, Hanru compris qu’il restait impuissant aux décisions de son frère. Il ne pouvait savoir ce qu’était ce lien si particulier entre deux jumeaux, mais il avait lui aussi ce sentiment d’incompréhension et l’inaction le rendait fou. Il ne pouvait renoncer à veiller sur un ami, non pas pour Akshar, mais pour lui-même.
Rapidement, la discussion s’oriente sur la chambre partagée entre les Yatagarasu et il ne pouvait nier que son cousin contribuait grandement à contrarier leurs humeurs lorsqu’il s’agissait de la propreté exemplaire dont ils faisaient pourtant preuve et qui n’était jamais suffisante ou de faire sortir la chauve-souris sous ce même prétexte. Plus encore lorsqu’il les réveillait au milieu de la nuit pour des raisons peu valables. En dépit des apparences, Hanru n’avait pas à se plaindre, le Tsukino avait lui une chambre dans laquelle il ne dormait pas pour au moins deux de ses colocataires. Ses relations étaient chaotiques et si lui restait neutre concernant le Fujiwara qu’il savait être insupportable quand il le voulait, mais pas avec lui. Mieux valait ne pas s’en mêler, ça ne le regardait pas. « Il aurait été judicieux de faire changer de chambre au moins l’un de vous, ta patience est édifiante » ils avaient dû essayer sans succès. « Maintenant c’est un peu tard, nous sommes plus proches de la fin » plus encore pour le principal concerné pour lequel il ne restait plus que quelques mois à porter l’uniforme. « Tu comptes faire quoi une fois diplômé ? »
Un sourire narquois décorait ses lèvres alors qu’il levait un sourcil aux mots de l’Awataguchi. S’il avait pu changer de chambre, il se serait fait un plaisir de le faire, qu’importe le moment ou l’année, seulement, il n’avait guère eu le choix, et l’école entière était devenu comme son refuge. Il n’aimait se retrouvait dans cette pièce maudite, emprisonner avec les pires raclures du Japon, respirer le même air que ces déchets lui donnaient des migraines sordides.
Avenir décidé depuis petit, le prestige de son nom lui ouvrait autant de portes qu’il n’en bloquait, impossible pour lui de se reposer sur ses lauriers. Akshar le savait, il était destiné à travailler comme ses parents l’ont fait, et ses enfants eux aussi, suivront ses pas.
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05.11.97
Sur son épiderme se dressait l’inconfort provoqué par les sourires insouciants, méprisant leur condition au-delà de leur raison. Que les imbéciles se targuent de les incriminer ne le dérangeait en rien, les regards glissant sur eux sans jamais les souiller. Aussi se lassa-t-il de croire en une rédemption lorsque la vérité sortie de la bouche du Tsuchigumo a blessé par son nom plus que par sa raison. Mieux valait ne pas s’en préoccuper. De ses yeux clairs il nargue à son tour par son attention détournée, dévouée et entière à son ami au lieu de ces ignorants insectes incapables de se remettre en question. Hanru n’aimait pas perdre son temps, aussi préféra-t-il quérir les informations relatives à cette mauvaise humeur justifiée par nombre de facteurs, dont l’une fort connue n’était autre que cette chambre. Un refuge qui n’en était plus un désormais.
Fort heureusement il n’aurait bientôt plus à la supporter, regret de ne plus voir ses amis et d’avoir potentiellement des connaissances avec lesquels son entente serait mauvaise. Hanru serait en douzième année et Akshar laisserait comme son jumeau un vide qu’il comblera par ses missives. Nul doute que dans son attachement particulier, il glisserait toujours de quoi les agacer, imaginant à la perfection leurs expressions dont il pouvait les discerner et dissocier pour leur être propre. D’un léger sourire, il acquiesce. « Je comprends » de son avenir il ne retient que ses affinités avec l’épée et la magie ancestrale apprise depuis l’enfance malgré l’usage interdit hors des cours. « Onmyoji » entre autres voulut-il ajouter. Il n’en fit rien, laissant son propre destin d’héritier à l’humble discrétion de ses pairs.
Tous deux se redressèrent et sur leurs doutes se séparèrent dans un hochement de tête et une frappe sur l’épaule. « À plus tard petit caribou sucré » pensif, ses mots se turent en même temps que la silhouette se fondait dans la foule.